Pierre Mercier fait partie de la « promotion » 2015 de 64_page, depuis deux années que nous le connaissons, il a multiplié les expériences intéressantes et enrichissantes. L’occasion d’en parler avec lui…
1. Explique-nous ton parcours. Qu'est-ce qui t'a amené à suivre des cours de dessin, de venir à l'ERG à Bruxelles? Et ce que cela t'a apporté?
Pierre : Je suis arrivé à l’ERG (un peu) par hasard. Quand on a commencé à nous parler de métier, je savais que je voulais dessiner et j’ai alors choisi l’illustration. J’ai passé mon bac STI Arts Appliqués (section artistique) et j’ai atterri à La Souterraine en BTS (2 ans) en communication visuelle. Ensuite j’ai tenté Illustration Scientifique et Médicale à Paris. J’ai raté le concours mais une de mes profs de BTS nous avait parlé des écoles bruxelloises. J’ai donc postulé à l’ERG (puisque la Cambre n’enseigne pas la BD ou l’illustration et que les frais de dossiers étaient plus chers à St Luc, je crois. Bref) et je suis arrivé directement en BAC 2. J’ai l’impression que l’ERG a autant de qualités que de défauts, et les deux pourraient se résumer à la liberté qu’on y a. Tout en suivant l’atelier d’illu-BD, j’étais aussi au fil des années en cours de gravure sur métal, d’art numérique et d’animation. Je parlerais pour la section narration, mais aucun prof ne vous dit vraiment ce que l’on DOIT faire. Si tu ne travailles pas ce n’est pas vraiment le problème des profs, tu es tout seul à en pâtir. C’est à toi de savoir ce que tu veux faire, comment et d’organiser ton temps pour, sinon, et bien tu glandes. C’est cool, mais au final tu n’es pas allé bien loin.
2. Tu as publié dans le 64_page #2 (avril 2015) un extrait fascinant d'un projet très vaste Le Palais, que devient ce projet? Est-ce que tu y travailles toujours?
Pierre : Et bien il est en pause depuis un moment ! C’était mon travail de M1, et en M2 je me suis lancé dans la couleur et dans un autre projet. Il s’avère que je vais me replonger dedans avec deux amis, Vérane Rebet et Noam Rzewski. Vérane, qui avait suivi sa réalisation, s’en était inspiré pour un atelier son à La Cambre, et elle avait demandé de l’aide à Noam (le créateur sonore du projet Jungle Space in America, dont je fais partie). L’idée était, en gros, d’en faire la bande son, d’en faire une déambulation sonore. Je n’avais pas du tout participé à ce travail mais ils m’ont proposé de pousser plus loin le projet, ce que j’ai tout de suite accepté. L’idée est de mélanger BD, son, scénographie et maquette, puisque je voulais en Master qu’il y ait un dialogue entre maquette et dessin. Affaire à suivre donc.
3. Parle-nous de projet collectif Jungle Space in America, raconte la genèse de ce projet et son évolution future ?
Pierre ; En septembre dernier je suis parti en résidence de création à Talange (FR) avec quatre amis qui sortaient de mise en scène à l’INSAS et de scéno à la Cambre, pour créer une pièce de théâtre sans paroles, Jungle Space in America, inspirée d’une nouvelle de H.P. Lovecraft.
Au départ je ne devais faire qu’une sorte de carnet de bord, une documentation dessinée de la résidence. Mais on a très vite voulu aller plus loin ; sont alors nées les parties installation et bande-dessinée du projet. Il s’avère que chacun d’entre nous avons un rôle et une pratique de prédilection au sein du collectif ; il y a Noam, dont j’ai déjà parlé, qui s’occupe du son, Léonard Cornevin de la lumière, Marie-Laeticia Cianfarani de la scénographie et Camille de la mise en scène. Mais nous travaillons en collectif où chacun suggère des idées aux autres, dans toutes les disciplines. Nous ne restons pas cantonnés. Il y a deux jours se terminait Visions aux Halles de Schaerbeek où l’on a présenté notre première étape de l’installation. Il y aura notamment une présentation de la pièce à Talange, la sortie de la 1ere partie de la BD, Jungle, avec une expo aux Halles Saint-Géry et aussi la création d’une forme « Conférence », toujours en lien avec ce projet, un brin tentaculaire.
4. Tu vas en Avignon pour participer à une résidence artistique, expliques-nous ce projet? Ce que tu en attends? Et aussi quels sont tes autres projets?
Nous y sommes déjà avec ERSATZ, le même collectif que pour JSA, mais pour un autre projet de théâtre et d’installation, Quelques Rêves Oubliés. Il s’agit du travail de fin d’études de Camille, une adaptation d’un texte jamais monté ou édité en français, de Oriza Hirata, auteur japonais. Ici, à La Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon, nous travaillons uniquement sur la technique. Et comme pour JSA, le dispositif scénique a une place prépondérante.
La lumière, le son et la scénographie sont des « personnages » à part entière, ou en tout cas ils sont au même niveau que les comédiens. Ils permettent, comme la 2D et le dessin, de témoigner des présences étranges inhérentes au réalisme onirique de ce projet, de ce texte. Nous serons par ailleurs en avril prochain en résidence au Japon, cette fois avec les trois comédiens (Gwen Bérou, Pauline Gillet et Aurélien Dubreuil-Lachaud), et où je continuerais l’archive dessinée du projet.
Au théâtre il n’y a pas que le jeu et le texte. En traversant un châssis ou un élément de scénographie, les personnages peuvent se retrouver à changer d’espace, de temps et de lumière. Exactement comme sur une planche de BD. Si cela a été un réelle découverte, elle m’a beaucoup et continue de m’apporter et de m’inspirer dans le dessin. Et dans le cas de notre collectif, cela fonctionne aussi dans l’autre sens.
Pour l’instant je suis pas mal occupé avec tout cela mais je voudrais reprendre mon travail de Master 2, un dialogue quasi fantastique entre 2 employés d’une centrale hydraulique souterraine confrontée à une panne plus qu’inattendue, puisqu’en principe inexistante. J’aimerais aussi faire de l’illustration pour la presse, mais je n’ai encore engagé aucune démarche.