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© Julie Mandarine & Jean-Christophe T

 

Les auteurs du 64_page #27 se dévoilent :

Alice WION : Tard la nuit

Interview Gérald Hanotiaux

Aujourd’hui, nous partons à la rencontre d’Alice Wion, autrice dans le numéro 27 de quatre pages très colorées intitulées Tard la nuit. Elle se présente elle-même comme une éternelle rêveuse… Mais vers quel rêve a-t-elle décidé de nous emmener avec cette histoire ?

Gérald Hanotiaux. Pourrais-tu te présenter à nos lectrices et lecteurs ?

Alice WION

Alice. Je m’appelle Alice Wion, mais je réponds sur les réseaux sociaux au doux (et bizarre) pseudo de Jolsma. Lorsque j’avais huit ans, en Bretagne, j’ai pu assister dans un ancien château au spectacle d’une conteuse d’histoires bretonnes. Cela m’a fait un déclic, et ma vocation s’est alors révélée à moi-même : je deviendrais conteuse d’histoires. Pas de chance, ce n’était pas un vrai métier… J’ai donc enfoui ce rêve au plus profond de ma mémoire, jusqu’à ce que la passion du dessin me frappe en plein visage, à l’âge de treize ans. Il m’a alors encore fallu plusieurs années pour réaliser la possibilité de mélanger le dessin avec la narration, pour créer au sein d’un medium jamais abordé : la bande-dessinée. Entre temps, j’étais entrée aux Beaux-Arts de Cambrai et, en 2023, j’en suis ressortie avec mon diplôme. Depuis la rentrée de cette même année, je suis inscrite à Bordeaux pour un master en bande dessinée, dans l’orientation « Édition, Théorie et Critique », au sein de laquelle nous étudions la bande-dessinée d’un point de vue plus universitaire et théorique.

Tu nous présentes quatre pages très lumineuses intitulées Tard la nuit. Histoire d’allécher les lecteurs, pourrais-tu nous présenter cette bande dessinée en quelques mots ?

Tard la nuit raconte l’histoire d’une petite fille, qui pourrait être n’importe laquelle d’entre nous lorsque nous étions enfants, rêveuse, curieuse et crédule. Un jour, voulant absolument prouver à ses amis – sceptiques – que les lampadaires sont allumés par les lucioles, elle décide de veiller, après l’heure du coucher… Pour savoir ce qu’elle a finalement aperçu : il va falloir lire la suite de la bande dessinée.

 

© Alice WION : Tard la nuit

Au niveau de la réalisation de ces pages, pourrais-tu décrire ta manière de procéder ? Quels outils as-tu utilisés ?

Pour toutes mes bandes dessinées, albums et autres travaux graphiques, j’utilise un seul et unique carnet depuis octobre 2022. Il est d’ailleurs bientôt fini, je suis plutôt fière de moi… À l’intérieur, en premier lieu, je note le thème de la bande dessinée, suivi des contraintes techniques à prendre en compte. Ensuite, je note en vrac les idées qui me sont venues, souvent en marchant, ou en écoutant de la musique. J’écris ensuite le pitch de façon très littérale, en faisant très attention à avoir une vague idée de la fin. Ensuite vient le storyboard, qui respecte habituellement toujours le même schéma : une double page avec, à gauche, un découpage et des croquis très simplifiés, mais lisibles, du moins pour moi. Ensuite, sur la page de droite, on trouve le texte de chaque case, le tout numéroté. Pour certaines de mes bandes dessinées, il y a en bonus une ou deux pages de recherches de design de personnages ou d’éléments importants du récit.

Tard la nuit a été ma première bande dessinée réalisée en digital. L’année précédente, j’avais reçu une tablette graphique, mais je ne l’avais que très peu utilisée, étant toujours fermement attachée à mes feutres à alcool. Cela a été un véritable challenge pour moi, notamment pour me retrouver dans tous les « calques », mais cela m’a permis d’expérimenter de nouvelles techniques de colorisation. Bon, après avoir travaillé intensément sur la tablette, j’ai souffert du fameux syndrome, pendant quelques temps, de désirer pouvoir taper « ctrl+z » – retour en arrière – pour corriger des erreurs de mes dessins sur papier !

Procèdes-tu toujours de cette manière, ou t’arrive-t-il de développer d’autres styles ?

Pour trouver les idées, c’est souvent le même processus, je marche, j’écoute de la musique, je laisse aller mon imagination… En fonction de la musique écoutée à cet instant-là, les idées s’installent et évoluent. C’est un peu une variante de « La dérive », une promenade de l’errance appréciée par Guy Debord et ses camarades du mouvement Situationniste. Ou un peu comme dans cette scène de Ratatouille (2007), où Rémi entend différentes musiques en goûtant divers aliments !

Quant au genre de bande dessinée, j’adore expérimenter, donc ce n’est clairement pas mon unique style, tant graphiquement que narrativement. Il m’arrive de faire du cartoon, du semi-réaliste – enfin j’essaie -, ou encore du manga… Mais ce qui m’amuse le plus d’un point de vue graphique, c’est d’essayer différents médiums pour mes bandes dessinées : la risographie, les surligneurs, les crayons de couleur aquarellables, etc… Prochainement, je vais essayer de réaliser une bande dessinée en linogravure, souhaitez moi bonne chance !

Hé bien bonne chance ! Du coup, comme tu évoques un projet proche, d’une manière plus générale, quels sont-ils ? Notamment à plus long terme, vers quoi voudrais-tu te diriger ?

J’ai beaucoup trop de projets en cours, mes copines peuvent en attester. Je les remercie d’ailleurs au passage, de toujours écouter toutes mes idées délirantes… Actuellement, j’ai deux ou trois projets d’albums jeunesse, dont un en collaboration, à l’écriture, avec une de mes amies. J’ai aussi un projet, à plus long terme, d’une bande-dessinée sur des histoires familiales, avec un bon potentiel, selon certains professionnels du milieu. Cette année, j’ai également postulé pour participer à deux autres magazines, pour des bande-dessinées d’une bonne dizaine de pages. Et quand j’ai le temps, je cale par ci-par-là divers projets pour des concours : typographies, bande-dessinées courtes, logotypes, charadesigns (NDR. pour Character design, la création de personnages dans l’animation), affiches, illustrations …

Je suis quelqu’un de très touche-à-tout, j’adore l’expérimentation. Dès lors, pour l’avenir, je ne sais pas trop vers quoi me diriger, j’ai un peu envie de tout faire. Idéalement, vivre de la bande dessinée ou de l’illustration, ce serait formidable. Je serais aussi ravie de pouvoir travailler en charadesign, dans une entreprise d’animation ou de jeux vidéos. Mais je suis consciente de la rudesse du milieu. Si cela ne peut pas se faire pour une raison ou une autre, je serais tout de même contente de travailler en maison d’édition, ou dans l’univers du graphisme. Il y a quelques années, je disais souvent « Tant que j’aurai un crayon dans la main, je serai contente ». C’est toujours le cas.

Pourrais-tu nous parler de tes influences ? Et plus largement des auteurs/autrices qui ont marqué ton parcours de lectrice ?

Mes influences ne se limitent pas à une période, à un mouvement, ou même à un medium. J’aime observer, regarder autour de moi, lire, et parfois je me dis « tiens, j’aime cette idée. C’est vraiment chouette ». Je peux écouter de la musique électronique, et juste après de la musique folklorique d’Europe de l’Est. Je suis aussi capable de regarder un dessin animé, à la base destiné aux enfants, et juste ensuite enchaîner avec un film d’horreur très sanglant. En général, j’aime les choses étranges, hors-normes.

Pour la bande dessinée, je ne me considère pas comme une grande amatrice de franco-belge, mais la série Astérix, d’Uderzo et Goscinny, m’a énormément marquée par ses calembours, son humour très brillamment maîtrisé et son dessin compréhensible et beau. J’ai sinon beaucoup été influencée par les mangas : Junji Ito, Toru Fujisawa, Go Nagai, Mitsutoshi Shimabukuro, Kamome Shirahama, Boichi… Mais l’auteur le plus important pour moi a été Yoshihiro Togashi, découvert en 2013 avec Hunter X Hunter, alors que j’étais en sixième. Un véritable électrochoc. Cet univers, riche par sa narration et ses personnages, a permis de modeler la personne que je suis aujourd’hui, d’un point de vue artistique.

Cette année, j’ai découvert le travail de Paul Kirchner, auteur de bandes dessinées surréalistes et déjantées, à l’univers graphique fourmillant de détails. J’adore, cela me fait penser au travail de Giuseppe Arcimboldo, mon peintre préféré, qui a fait irruption dans ma vie, enfant, par la lecture d’un numéro du magazine Je lis des histoires vraies, qui lui était consacré.

Pourquoi as-tu répondu à l’appel de 64_page ? Quel rôle vois-tu pour cette publication dans ton parcours ?

Je l’envisage comme une expérience, en participant à cet appel j’ai vu l’opportunité d’acquérir une idée plus concrète du milieu de la bande dessinée. Lors des études, passées et actuelles, on parle des publications dans les magazines, du monde éditorial… La théorie, c’est bien, la pratique, c’est mieux ! C’est l’occasion de tester, de me lancer, et d’arrêter de parler en passant à l’action. Le milieu de la bande dessinée est malheureusement « difficile », commencer avec 64_page est un très bon début à mon avis, et peut être un tremplin pour la suite. Cela pourra peut-être m’ouvrir d’autres portes pour le futur.

Tu l’évoques un peu, mais de manière plus générale, comment vois-tu le secteur de l’édition ? Tu penses qu’il est facile de s’y insérer ?

Ayant actuellement des cours en relation avec le monde éditorial, je peux uniquement évoquer l’aspect théorique rapporté par mes professeurs, ou provenant de divers témoignages dont j’ai eu l’écho. Je trouve ce domaine très passionnant, mais aussi très sélectif. Le plus dur est de s’y faire une place, de réussir à convaincre. Un « réseau » personnel est extrêmement important dans ce genre de métiers, et il ne faut pas hésiter à y faire appel si besoin. Bien que le milieu du livre soit un peu en difficulté ces derniers temps, la petite bulle de la bande dessinée – sans mauvais jeu de mots – se porte mieux que les romans et autres textes plus littéraires. Néanmoins, il ne faut pas non plus se la couler douce si on compte entrer dans ce milieu-là. Le secret est de persévérer, ne jamais baisser les bras, ne surtout pas abandonner au moindre échec, bien au contraire. Il faut l’analyser, pour comprendre ses erreurs, et pouvoir corriger le problème afin de revenir à la charge, encore plus fort.

Que penses-tu, de manière générale de l’enseignement artistique ? Comment décrirais-tu ce que cela t’apporte ?

Je l’ai dit, je suis passée, de 2019 à 2023, par l’École Supérieure d’Arts de Communication de Cambrai, où j’ai pu avoir beaucoup de pratiques différentes : vidéo mapping, gravure, webdesign, design graphique, reliure, typographie… Paradoxalement, je n’ai pas eu tellement de cours de dessin, un petit peu en première année, un peu aussi en troisième année, mais on réfléchissait plus à composer un projet illustratif qu’apprendre à dessiner en soi… Et c’est tout. J’ai donc beaucoup plus pratiqué le dessin de mon côté, par moi-même, tout en y appliquant de temps en temps les informations et outils à ma disposition, grâce notamment aux cours. Mais, par exemple, je n’aurais jamais imaginé, seule, à un jour réaliser une bande dessinée en risographie !

Beaucoup de personnes apprennent l’art, l’illustration en autodidacte intégral, en n’ayant jamais mis les pieds dans une école d’art. C’est sujet à débat, mais d’un point de vue personnel, il me semble important de suivre des cours réguliers si on veut se professionnaliser, même si ça représente, je l’admets, une énorme pression, c’est une source de stress difficile à encaisser pour certains. Bien sûr, certains réussissent en ayant toujours été autodidactes, cela existe. Mais avoir un professeur régulier, qui nous suit personnellement, est selon moi un bonus non négligeable. Internet et ses tutoriels peuvent difficilement entrer en concurrence avec eux.

Un mot de la fin ? Quelque chose d’important que l’on n’aurait pas abordé ?

J’ai l’impression d’avoir beaucoup parlé, je suis à sec ! Si, vraiment, je devais donner un mot de la fin, je dirais de ne jamais lâcher la passion et la flamme, tant comme lectrice que comme autrice. Parfois, il faut arrêter de trop réfléchir, et se laisser aller pour revenir à ces émotions pures qui nous ont animé au tout début, quand nous avons commencé à dessiner ou lire, par simple plaisir…

Merci Alice !

 

Vous pouvez voir le travail d’Alice Wion en consultant ce lien:

 https://www.instagram.com/jolsma



 

Mechaa Fact : Les Esprits d’Edo

Interview de Gérald Hanotiaux
Aujourd’hui, nous partons à la rencontre de Mechaa Fact, qui propose dans notre vingt-septième numéro une histoire en six pages intitulée Les esprits d’Edo. Elle démarre en mer, pour se poursuivre dans des décors japonais typiques du 19ème siècle… Mais qui se cache derrière cette histoire ?
Gérald Hanotiaux. Pourrais-tu te présenter brièvement à nos lectrices et lecteurs ?
 

Mechaa Fact

 

Mechaa Fact. Je m’appelle Mechaa fact et je suis graphiste et illustrateur, mais il m’arrive également de travailler comme journaliste culturel. Assez récemment, j’ai pu aborder le milieu de l’art contemporain, je suis donc plutôt multitâches… Aujourd’hui, je me présente comme auteur de bande dessinée, « en démarrage ».

Tout a commencé lors du confinement, décrété lors de la pandémie de Covid. Beaucoup de gens ne veulent plus en entendre parler, je sais, mais cette période s’est néanmoins avérée très importante, tant dans mon processus de travail personnel que pour le monde dans lequel nous vivons. Aujourd’hui, les gens ont plutôt tendance à très vite oublier les événements, en raison notamment des réseaux sociaux et du monde en accéléré dans lequel nous évoluons… Concernant mon travail, comme le temps libre était plus important, plutôt que de m’apitoyer sur un monde en veille, je me suis concentré sur mes pratiques artistiques. J’ai alors touché à différents supports, pour expérimenter de nouvelles choses, et la bande dessinée en faisait partie. Il s’agissait cependant avant tout d’un rêve d’enfance, alors autant y aller ! Pour le moment, je reste très focalisé sur la bande dessinée, j’ai un peu laissé de côté mes autres supports, car on ne peut courir cinq lièvres à la fois, sinon on n’en attrape aucun…
Tu présentes six très belles pages intitulées Les esprits d’Edo. Histoire d’allécher le chaland, peux-tu la présenter en quelques mots ?
J’ai trouvé intéressant de confronter l’Occident à l’Extrême-Orient, en choisissant comme période historique la réouverture économique du Japon face à l’économie occidentale, au dix-neuvième siècle. Le sujet m’inspirait beaucoup, c’est une période majeure de transformation pour le Japon. Pour les protagonistes, j’ai pensé à un personnage d’officier français, très ethnocentré comme beaucoup d’occidentaux à cette époque, qui accompagne au Japon l’ambassadeur de France. Celui-ci s’installe dans une maison bourgeoise près de Edo, l’ancien nom de Tokyo. Il sera confronté à un monde très inspiré du folklore horrifique japonais, qui dépasse nos imaginaires et est un véritable vivier d’inspiration. Mon histoire est aussi teintée de l’univers du mangaka Junji Ito.

©Mechaa Fact : Esprits d’Edo (extrait page 1)

Au niveau de la réalisation de ces pages, pourrais-tu décrire ta manière de procéder ? Quels outils as-tu utilisé ?
Je travaille essentiellement sur tablette. Grâce en partie à mon expérience de graphiste, je suis assez à l’aise avec les supports numériques. Et puis le numérique permet de tester des mises en page plus aventureuses que sur papier. J’ai une vision plutôt «spatiale », dans ma manière de concevoir l’image, je peux donc appliquer plus directement une idée de départ sur mon médium, c’est très pratique… Cela dit, je peux comprendre les auteurs de bande dessinée qui ne sont pas à l’aise avec ce support. Toutes les techniques se valent, selon moi, à partir du moment où on est à l’aise avec celles-ci.
Avec cette histoire, serais-tu dans un univers et un décor de prédilection ?
Non, je suis plutôt éclectique. Je pense avoir beaucoup d’imagination, et je m’intéresse à différents domaines comme le cinéma, la bande dessinée, la littérature, l’art, le clip vidéo… Même l’art en Intelligence Artificielle m’intéresse. Certains artistes, très bons dans ce domaine, peuvent y développer des dingueries sans voler le travail d’autrui… Dans tous ces domaines, mes goûts s’avèrent très éclectiques et ouverts, et je peux changer d’univers sans aucun problème. Actuellement, par exemple, je travaille sur une dystopie et sur un sujet historique. Récemment, j’ai eu l’opportunité de placer des planches dans le journal français L’éponge (www.leponge.eu), avec un thème imposé de l’extérieur… Sinon je collabore en tant que scénariste sur une histoire plus métaphysique, avec la dessinatrice Cécile Gonneau, dont je conseille à tout le monde d’aller voir le travail. J’ai du mal à rester sans activité, et j’adore tester des univers nouveaux.
J’ai une forte disposition à traiter notre relation au numérique, mais j’aime aussi beaucoup les sujets historiques, pour ne pas perdre les repères de nos origines… Il est important d’avoir ce lien avec le passé pour garder le recul et ne pas se laisser dévorer par cette « culture de la technologie », qui devient la culture hégémonique de notre époque. Supprimer nos repères, c’est supprimer notre humanité.
Sur un plus long terme, tu sembles donc parti vers une poursuite dans la bande dessinée… ?
Tout à fait et, comme je le disais, je le dois un peu au Covid. S’il n’y avait pas eu ce confinement, très compliqué pour beaucoup, je n’aurais sans doute pas pu vous présenter mes pages. Notamment car j’aurais continué à faire mon travail habituel, sans réfléchir à ma propre voie. Comme j’aime les concepts de séries au long cours, et adore raconter des histoires et diversifier mes univers, pour tout cela la bande dessinée est selon moi le meilleur support. Et puis en tant qu’auteur complet, il est possible de mener un projet de A à Z, tout nous appartient. En comparaison avec le cinéma, nous bénéficions d’une liberté totale, car au cinéma si une personne a une idée en amont, pour la réaliser cela nécessite l’implication d’un nombre incroyable de personnes. Sans budget, en bande dessinée on peut produire « son propre film ». Ça rend plus accessible le processus créatif.
Si je peux réaliser ce souhait d’être édité et de partager mon travail un jour, j’aurais sans aucun doute une chose en moins à regretter sur mon lit de mort… C’est important de réaliser ses rêves, afin de ne pas se sentir frustré. Ça semble également être le meilleur choix, si tout se concrétise, de respecter mon souhait d’enfin exprimer ma personnalité à travers mon propre travail. L’art est un bon moyen d’exorciser les
blessures d’enfance.
Pourrais-tu nous dire quelles sont tes influences en bande dessinée ? Ou en tout cas les auteurs et autrices qui ont marqué ton parcours de lecteur ?
J’ai commencé, dans l’enfance, avec des références comme L’élève Ducobu, Kid Paddle, Spirou. La série Blake et Mortimer, également, reste une influence majeure pour mes choix dans le dessin, plutôt lié à l’école belge de la ligne claire. J’aurais pu un moment dévier vers le manga, mais peut être par respect et fierté envers notre patrimoine, je suis finalement resté dans le graphiquement belge… Une envie de continuité.
Après ces séries, un peu plus tard, j’ai assez vite ouvert les albums de la série Valérian, dessinée par Jean-Claude Mézières. Cela collait avec mon goût pour le cinéma de science-fiction, apprécié très tôt. Je dois également citer la série Jeremiah, de Hermann, pour son côté post-apocalyptique. Aujourd’hui, je suis toujours intéressé par la manière dont sera constitué le monde de demain, un contexte exploré dans mon projet de dystopie, en développant certaines problématiques actuelles. Par la suite, pendant un long moment, j’ai complètement délaissé mon intérêt pour la bande dessinée, accaparé que j’étais par le travail. Et, à nouveau, c’est durant le confinement que j’ai découvert de nouveaux auteurs, certains très éloignés du franco-belge comme Daniel Clowes ou Chris Ware, malgré tout selon moi assez marqués par la ligne claire. Les compositions graphiques de Chris Ware m’impressionnent beaucoup, il ose tout ! Ce type d’audace me semble intéressante, réellement, à intégrer dans mon travail. Et enfin je ne peux rester insensible à l’écriture de Fabien Vehlmann, il arrive à aborder
de nombreuses thématiques sociétales dans une seule et même série.
Aujourd’hui je lis énormément de bandes dessinées, de genres complètement différents, et j’adore voir ce qui se fait ailleurs. Je peux lire tant du commercial que des choses plus alternatives, tout peut être intéressant, et toute idée peut nous inspirer. J’aime beaucoup Timothé Le Boucher, Ugo Bienvenu, Enki Bilal, Guillaume Singelin, Émile Bravo et Léonie Bischoff. Le manga Akira, de Otomo, peut aussi être cité comme une référence majeure pour moi, aussi car le manga s’accompagne de l’expérience très immersive du film. Le cinéma reste, quoi que l’on dise, le premier support qui imprègne les mémoires sur le long terme au point de vue culturel, car les émotions sont directement impactées. Je n’hésite pas à aller chercher des références dans le cinéma, la vidéo, dans ce que j’observe autour de moi… Je mélange les supports culturels, pour y puiser mon inspiration. C’est important de multiplier les références afin de ne pas s’enfermer, laisser l’imaginaire puiser partout…
Pourquoi as-tu répondu à l’appel de 64_page ? Quel rôle vois-tu pour cette publication dans ton parcours ?
La réponse me semble assez évidente, comme tous les autres participants je suppose : l’avantage de la visibilité.
Un mot de la fin ?
Hé bien j’encourage tout le monde à aller voir mon travail aux liens ci-dessous, car je continue à y multiplier les champs d’action.
Merci Mechaa Fact !
Vous pouvez voir le travail de Mechaa Fact en consultant ces liens :

https://www.mechaafact.com

https://www.instagram.com/in_loading_of

https://magazine.culturius.com/author/mecha/