LES ALBUMS, D’AUJOURD’HUI, DES AUTRICES ET AUTEURS QUI ONT PUBLIÉS, HIER, DANS 64_p
Trefilis : La montagne
Premier album auto édité pour Tréfilis. Qui a publié plusieurs histoires courtes – toujours en noir – et blanc dans les 64_page, citons : Praxographie (#25), L’invisible (#24), Mon ombre est moi (#23). C’est encore le noir et blanc qu’il propose pour La Montagne, un récit mystérieux dont les personnages sont étranges. Gaell le héros est tour à tour comme issu d’un Moyen-âge profond ou d’un avenir incertain.
L’album commence par une scène violente, Gaell est tabassé par des individus brutaux et frustres issu d’un autre clan. Péniblement, il réussit à rentrer dans le sien, il y est mal reçu et menacé. Il décide de s’enfuir à la recherche d’un autre monde, meilleur. Une quête initiatique qui est ni sans risque ni sans danger.
Trefilis utilise le noir et blanc et la violence de ses contrastes avec un talent évident. Les scènes de montagnes, vastes paysages où la nature vit et parfois se déchaîne sont magnifiquement maîtrisées même si le récit n’est pas toujours très limpide, il y a matière à se laisser envouter. Découvrir demande parfois, aussi, un effort…
La Montagne, Trefilis, autoproduction disponible chez dimiguich@gmail.com.
Marie Pascale Peeters : L’enfant Indigo
Marie Pascale Peeters est une dessinatrice très présente dans 64_page (Les mouettes et le marin (#26), Le jour où les poissons auront vraiment chaud (#25, Ismaël et les pigeons (#24)…). Elle est passionnée de nature, d’oiseaux, d’animaux et une dessinatrice qui utilise le Tetrapak comme support. Bref une personnalité !
L’enfant Indigo est un conte écologique qui aborde, pour un public d’enfant, la problématique du réchauffement climatique : la sécheresse, le manque d’eau, les terre qui deviennent arides, infertiles, … L’enfant, dont le prénom est Indigo, le nom d’une couleur, d’un mythe, d’une sagesse, d’un bleu obtenu à partir de l’indigotier et d’une teinture végétale qui date de la plus haute Antiquité. Un savoir-faire ancestral maîtrisé par les Amérindiens mais aussi en l’Afrique, en Inde et au Japon.
Le parcours de l’enfant est celui de ceux qui face aux désastres des délires humains, recherchent la nature, son renouveau
Un petit livre d’espérance à raconter et lire aux enfants
L’enfant Indigo, Marie-Pascale Peeters, éditeur, prix …2025
Charlotte Rotman, Lison Ferné & Anne Bouillon : Les femmes ne meurent pas par hasard
La journaliste de Libération Charlotte Rotman suit le quotidien d’Anne Bouillon, une avocate qui, depuis vingt ans, s’est spécialisée dans la défense des femmes. Lison Ferné est une jeune dessinatrice connue pour ses engagements notamment féministe et écologiste. À travers le vécu dramatique de six femmes victimes à divers degrés de la violence de certains hommes, les autrices nous plongent dans l’univers de la justice, ou plutôt de l’injustice trop souvent faite aux femmes.
Outre son travail d’avocate, Me Bouillon est aussi présente dans l’empathie, le soutien, et est aussi militante. Sa vie et ses engagements sont le fil entre les victimes qu’elle rencontre et défend. Ces récits intenses, très difficiles, parfois violents, sont mis en image, tout en émotions, par une Lison Ferné en pleine possession de ses moyens. Les mises en page restent légères, partageant les émotions vécues par ces femmes qui demandent justice et écoute. Les magnifiques couleurs de Juliette Vaast participent à la réussite de cet album utile et nécessaire à la compréhension des enjeux sociétaux et des changements indispensables, tant pour les femmes que pour les hommes.
Les femmes ne meurent pas par hasard, Charlotte Rotman, Lison Ferné et Anne Bouillon, Steinkis, octobre 2024, 24 €
Hervé Kempf & Juan Mendez : Comment les riches ravagent la planète. Et comment les en empêcher
Hervé Kempf et Juan Mendez proposent un album à mettre dans toutes les mains sur les urgences du climat et de la biodiversité. Les deux auteurs se mettent en scène et décortiquent la catastrophe écologique et sociale, d’où elle vient et pourquoi et ce qui nous attend, si nous continuons à foncer dans le mur en chantant les louanges du capitalisme et du consumérisme.
Vous découvrirez aussi une coutume des indiens du nord-ouest de l’Amérique, le potlatch et apprendrez que la richesse ne sert pas à satisfaire nos besoins, mais à nous distinguer des autres…
Hervé Kempf est directeur de la rédaction de Reporterre et auteur de plusieurs livres décapants. Juan Mendez, d’origine espagnol, a étudié la bande dessinée à Saint-Luc Bruxelles. Il est animateur en facilitation graphique et, aussi, dessinateur de presse. Il participe souvent à la Cartoons Académie Cécile Bertrand. Leur album est un outil indispensable pour comprendre comment la passion destructrice – la rivalité ostentatoire – d’une minorité, les quelques milliers d’hyper-riches, est occupée à détruire notre planète commune.
Comment les riches ravagent la planète et comment les en empêcher, Hervé Kempf et Juan Mendez, Seuil 2024, 20 €
Xan Harotin & Lucille Michieli : Nous t’attendions
Xan Harotin, avec son univers animalier, est bien connue et appréciée des lecteurs de 64_page. Elle est d’ailleurs, avec Johanne Gousset, une des auteures de la couverture de ce numéro. Pour ce nouvel album, elle est la scénariste de Lucille Michieli.
Un album de jeunes parents, qui nous plonge dans les pensées de ces instants privilèges, où les futures mamans, et papas, écrivent les premières pages du récit de leur enfant en devenir. Et nous savons comment s’inventer une vie, des amours, des désirs est nécessaire et essentiel pour chaque enfant. Et donc, pour chacun de nous dans notre vie.
Les joyeuses et fraîches gouaches, et crayons de couleurs, fourmillent de détails quotidiens et intimes qui suivent pas à pas le quotidien et les émotions de la future maman. Un album à raconter aux plus petits, certainement, mais aussi à celles et ceux qui se demandent comment ils sont arrivés là et qu’est-ce que maman pouvait faire et penser pendant ces longs mois mystérieux.
Nous t’attendions, Xan Harotin et Lucille Michieli, L’étagère du bas, août 2024, 14 €
Marine Bernard : La barbe
Qu’est-ce qui arrive à Zoé, la grande sœur d’Alice ? Zoé se découvre quelques poils au menton ! Cela bouscule, évidemment, sa vie de jeune femme passionnée de danse.
Comment va réagir Zoé ? Mais aussi sa jeune sœur Zoé, qui se vit comme une lionne, libre et forte, et leurs parents.
Marine Bernard avait proposé Poursuite, dans la revue 64_page #20. Les aventures décapantes de trois vieilles religieuses qui s’échappent du couvent pour célébrer la vie, la nature et l’extase de leurs vieux corps, sous les yeux ahuris d’un jeune curé.
Pour ce premier album, en revisitant le mythe de la femme à barbe. C’est évidemment la différence qui est questionnée, et surtout celles des femmes. L’auteure conserve sa liberté de ton et sa composition échevelée d’images débordantes de couleurs. L’énergie débridée de la petite Alice imprègne le trait et toutes les pages et nous entraîne dans une joyeuse sarabande tout en soulevant des questions qui préoccupent beaucoup d’enfants et, sans doute, aussi les adultes d’aujourd’hui.
La barbe, Marine Bernard, Alice éditions, 2024, 15€
Collectif des Harengs Rouges : Namur, hors les murs
Le Collectif des Harengs Rouges (collectif de raconteurs d’histoires issu de l’Académie des Beaux-arts de Namur) nous propose un splendide projet, un album collectif : rêver et illustrer ensemble le futur. Les artistes ont travaillé sur des rencontres-témoignages recueillies par les membres de la FUCIP, une ONG issue de l’université de Namur, très engagée dans la société d’ici et d’ailleurs et qui s’est donnée pour mission de mettre les étudiants et les professeurs en action.
Le racisme, le climat, la biodiversité, la justice, le vivre-ensemble, les rencontres proposées par Namur, hors les murs nous emmènent dans la capitale wallonne mais aussi à travers le monde, au Pérou, en Tunisie, au Canada, en Ukraine…
L’album est préfacé par Adélaïde Charlier du mouvement Youth for Climate et postfacé par Philippe Hensmans, ancien directeur d’Amnesty International.
Dans le 64_page #25, nous avons présenté l ’académie et son animateur, Benoît Lacroix, dans notre série L’atelier des maîtres.
Namur, hors les murs, Le Collectif des Harengs Rouges, Éditions namuroise, à commander chez l’éditeur editionsnamuroise.be ou dans toutes les bonnes librairies, 144 p., 24€.
Dina Melnikova et Pierre Coran : À tire-d’aile
Sur un poème léger de Pierre Coran, Dina Melnikova nous offre un hymne de couleurs diaphanes comme les ailes des libellules. Le sujet de ce petit livre par sa taille et son volume mais un grand livre, un livre essentiel pour les enfants comme pour les adultes.
Tout en surbrillance, Dina Melnikova évoque la beauté, la douceur et la lumière qui anime les ailes des libellules. Tout en finesse, elle évoque le feuillage, l’eau, le vent, toutes les nuances des bleus et des verts et convoque tout un éventail de techniques de la gouache au crayon.
Ce livre est une œuvre d’art née de l’osmose des auteurs, le texte minimaliste de Coran et la lumière fine, diffuse qui allume des vitraux aux inspirations naturelles.
Un voyage dans nos émotions, à découvrir à tout âge.
À tire-d’aile, Dina Melnikova et Pierre Coran, cotcotcot éditions, 2024, 10,90€
Céline Pieters et Celia Ducaju : Interlude
L’action de l’album Interlude nous emmène à La Roche-en-Ardenne où des soldats sont en stand-by, la campagne du sud de la Belgique est alors sous la neige et les journaux indiquent que la Seconde Guerre mondiale touche à sa fin… En attente de médicaments et de munitions, lors du parachutage, les soldats voient arriver un objet qui sort de l’ordinaire : un piano ! Poussé dans le dos par les Allemands, trois soldats vont le porter à travers la campagne, à la main, pour sauver l’instrument, délivrant une beauté magique dans un contexte dur et dangereux…
Dessinées avec un graphisme semi-réaliste réussi, les planches ont l’air d’être saupoudrées par les couleurs, chaudes et vives. Les effets de la musique sur les personnages sont représentés sur de lumineuses doubles-pages, dansantes et joyeuses, habitées du pouvoir d’évocation de l’ailleurs désiré, des êtres aimés… Dans nos temps troublés, voilà de quoi nous rappeler que même dans les moments les plus difficiles, l’espoir doit rester vif et bien présent. Celia Ducaju signe, avec Céline Pieters au scénario, une ode à la beauté qui s’invite dans le chaos.
Interlude, Céline Pieters et Celia Ducaju, Dargaud, août 2024, 21 €.
Mike Thexton et Johanna Gousset : Une aventure
Le parc de Richmond est le plus grand des parcs royaux de Londres, il existe depuis le Roy Henri VII (1485-1509). C’est là que Mike Thexton a vécu ses premières aventures de gamin et c’est là aussi qu’il emmène sa fille Zoé. C’est pour les 16 ans de Zoé qu’il écrit cette Aventure que Johanna Gousset va magistralement illustrer.
Nous suivons une promenade de Zoé et Mike qui traversent le parc de part en part. Une longue balade que Johanna Gousset choisit d’animer sur quinze double-pages horizontales. Ce format, exprime, à la fois, le temps qui s’écoule et le long cheminement à travers les majestueuses couleurs automnales d’un parc lumineux, une flore luxuriante habitée par une faune paisible qui nous offre son intimité. Les magnifiques dessins de Johanna rendent cette promenade bucolique, chargée de souvenirs et de découvertes.
Découvertes aussi pour les jeunes lecteurs dont les qualités d’observation sont aiguisées par deux planches de jeux et de conseils.
Une aventure, Mike Thexton et Johanna Gousset, éditions Lanista Partners, 2023, 12€
Aurélie Wilmet : Épinette noire
Basée au Danemark, Aurélie Wilmet est attirée par les grands territoires nordiques et leurs habitants, dans son premier album, Rorbuer, elle se plongeait dans les mythes et croyances d’un village perdu du grand Nord. Dans Épinette noire, c’est dans le nord canadien qu’elle plante son décor et ses personnages, dont Violette, la narratrice, une aviatrice de l’aéropostale. L’histoire nous renvoie en 1947, Violette s’apprête à s’envoler pour la dernière navette de la saison…
Le deuxième album est régulièrement très attendu comme confirmation d’un talent nouveau. Les magnifiques choix graphiques d’Aurélie, ses pages pleine couleur et d’autres aux seuls traits, le rendu des espaces infinis, le froid glacial, éternel, pénétrant et la fragilité de ce petit avion rouge, précieuse escarboucle, flamme de vie. Un défi graphique réussi et soutenu par le narratif du vécu de Violette, son voyage aventureux et risqué bien sûr mais aussi ses amours, ses amitiés, ses espoirs…
Épinette noire, Aurélie Wilmet, Super Loto Éditions / CFC, 2024, 29€ Rorbuer (2020) a reçu le prix de la première œuvre BD de Fédération Wallonie-Bruxelles.
Noelia Diaz Iglesias : Même pas peur !
Simon et son ami Hernesto ont pioché « les chauves-souris » comme sujet d’un travail à présenter à leur classe. Par chance, Simon vit dans le parc Marcellina dont son papa , Papatom, assure la garde et l’entretien. Les deux garçons y ont dressé leur tente et comptent y passer deux nuits à observer la vie de la nature. Hernesto est un petit citadin effrayé par cette vie grouillante, bruissante, luisante…
Le décor est planté, Noelia Diaz Iglesias peut s’exprimer en toute liberté. Sa virtuosité débridée, sa liberté graphique et son humour sont un réel bonheur. Sur chaque page, dans chaque case, il y a univers à découvrir, un insecte, une plante, une émotion… La curiosité des jeunes lecteurs est sollicitée en permanence.
Cette histoire est aussi celle d’une amitié entre deux garçons qui se sont construits dans des sensibilités et des mondes différents. Se découvrir, s’aider, se construire ensemble. Le choix des chauves-souris, quel merveilleux sujet pour oser découvrir les mystères de notre monde, de notre nature.
Même pas peur !, Noelia Diaz Iglesias, édition Panthera, 2024, 17,50€
Johanna Gousset : La fille et la baleine
Imaginez une énorme baleine bleue qui aurait écouté Georges Brassens, et plus particulièrement, Les gens qui sont nés quelque part. Contrairement aux personnages de la chanson, notre baleine n’est pas accrochée jusqu’à l’obsession à son clocher, elle a envie de découvrir du pays, mais ce n’est pas simple quand on est baleine. Arrive une petite fille rousse, et l’aventure peut commencer.
La fille construit un chariot, embarque la baleine et le périple peut commencer.
C’est la période bleue de Johanna Gousset ! Elle déploie de magnifiques nuances de bleu. Des bleus qui, sous les pinceaux de Johanna, deviennent aussi chaleureux que des tons rouge orangé et symbolisent l’amitié entre la fille et la baleine.
Pourtant, un jour, la baleine sent sa peau se tendre et durcir, elle doit retourner à la mer, mais la merveilleuse amitié et les aventures vécues à deux resteront dans les cœurs.
Un magnifique album tout en bleu à mettre dans toutes les petites mains rêveuses. Le monde est beau quand Johanna le raconte.
La fille et la baleine, Johanna Gousset, éditions Les bulles d’Alban, 2024, 15€
Ludovic Flamant et Hideki Oki : Le sourire du singe
« Un jour, sans que je sache pourquoi, on me mit dans la cage aux singes. Je n’étais pas un singe. »
Ludovic Flamant, que les lecteurs de 64_page connaissent, nous propose une fable sur notre humanité. Parmi les singes et leur vie quotidienne, notre humain, roi de la création, est vite déstabilisé.
Cette fable est illustrée par des magnifiques portraits de singes de Hideki Oki.
Cet album est le résultat d’une immersion et d’une rencontre entre Ludovic et Hideki dans l’atelier graphique du CRÉHAM, lieu emblématique où travaillent, à Bruxelles, des artistes en handicap mental.
Dans cette période compliquée et incertaine pour notre humanité, ce conte graphique nous interroge sur nos responsabilités et sur les perspectives que nous pouvons nous donner, à nous et à nos frères animaux. À lire, peut-être en parallèle avec Différents du primatologue Frans De Waal (Les liens qui libèrent)
Le sourire du singe, Ludovic Flamant et Hideki Oki, Esperluète éditions, 22€
Sara Gréselle et Ludovic Flamant : Ismolène & Chipolata : La folle virée
Les héroïnes du célèbre road movie de Ridley Scott, Thelma et Louis, prêtent leur Ford Thunderbird à Ismolène et Chipolata, deux chiennes qui s’ennuient dans leur vie, avec des humains sans rêves.
Le duo Sara Gréselle, aux illustrations, et Ludovic Flamant, au scénario, nous embarque dans une aventure qui a du chien : décapante, décoiffante, poétique et diantrement réaliste. Nos deux chiennes, issues de milieux sociaux différents, prennent la route de la mer et nous racontent l’amitié, la rencontre de l’autre, le partage de l’aventure, la confrontation des différences de sensibilité, de talents, de connaissances.
Les illustrations enlevées de Sara Gréselle sont pleine de trouvailles amusantes, dynamiques et débridées comme l’aventure partagée par nos joyeuses chiennes qui apprendront que si elles sont les meilleures compagnes des humains, l’inverse n’est pas vraiment vrai…
En ouverture de l’album, les auteurs proposent la playlist idéale pour savourer l’album à fond la sono. À partager sans frein avec les petits aventuriers : liberté, amitié, croquettes et rock and roll !
Ismolène & Chipolata : La folle virée, Sara Gréselle et Ludovic Flamant, Versant Sud, juin 2024, 19€90
Mathilde Brosset : Abel & Nour
Dans un album tout en hauteur, Mathilde Brosset déploie ses grandes et magnifiques illustrations de paysages et de forêts et plante ses personnages et leur amitié. Abel est un jeune garçon qui va, de château en village, entraîne, au bout d’une corde, Nour, sa ourse. Abel joue et rit, Nour danse et virevolte. Abel récolte les pièces d’or. Puis blottis l’un contre l’autre, au creux de la forêt, ils dorment.
Un jour Abel et Nour arrivent au château du roi où ils sont invités à danser pour la princesse Belladone. Abel trébuche et la princesse se moque de lui. Nour réagit et la renverse. Les soldats poursuivent Nour qui s’enfuit dans la forêt… Abel et Nour se retrouveront.
Comme dans chacun de ses albums Mathilde Brosset propose à ses très jeunes lecteurs une réflexion sur notre monde tel qu’il va. Les ours et d’autres grands mammifères reviennent dans nos forêts et montagnes, il faut réapprendre le vivre ensemble : il ne faut pas une corde pour qu’Abel et Nour restent amis…
Abel & Nour, Mathilde Brosset, éditions Versant Sud, 2024, 16,50€.
Alice Roussel ; Á l’ombre du pissenlit, chroniques botaniques en pleine herbe
L’histoire de cette BD et de son auteure est merveilleuse et inspirante. Alice Roussel décide d’intégrer un cours pour devenir herboriste. Pour s’éclater, elle décide d’un défi: présenter une fleur par semaine pendant un an sous la forme d’une BD humoristique courte. Le défi lancé, Alice s’applique et crée son univers et ses personnages. C’est 48 pages qui seront réalisées en 52 semaines. Pour finaliser son travail de botaniste, elle ajoute 17 pages. C’est avec un album de 65 pages qu’elle démarche les éditeurs. C’est l’éditeur indépendant spécialisé dans les livres et revues sur la nature et le jardinage, Terre vivante, qui la signe pour ce premier album.
Au fil des saisons, des promenades, sous les pluies ou sous le soleil, dans les champs, les sous-bois, les jardins, À l’ombre du pissenlit est un album plein d’humour et d’observations fines et scientifiques – les planches sont relues par François Couplan – à emporter avec vous. Il vous deviendra vite indispensable et ravira les plus jeunes.
Alice Roussel avait, début 2000, présenté ses premières planches à 64_page lors d’un workshop rencontres auteurs-éditeurs au Centre Belge de la Bande Dessinée.
Á l’ombre du pissenlit, chroniques botaniques en pleine herbe, Alice Roussel, Terre vivante, octobre 2024, 23€
Alice Roussel : La Compagnie des invasives
Alice Roussel a, aussi, réalisé les illustrations intérieures d’un petit livre écrit par Marianne Roussier du Lac qui est agrégée de Lettres et docteure en littérature, botaniste et ethnobotaniste. Les plantes invasives raconte les relations compliquées que celles-ci entretiennent avec les humains.
La Compagnie des invasives, Marianne Roussier du Lac et Alice Roussel, édition Le Pommier, 2024, 18€
Noelia Diaz Iglesias & Pauline Payen : Mauvaises herbes
On les appelle les mauvaises herbes, parce qu’elle se veulent libres et viennent pousser, sauvages, dans les semis bien ordonnés des jardiniers. Mais sont-elles ‘mauvaises’ ?
Pauline Payen, au texte, et Noelia Diaz Iglesias, au dessin, nous emmènent à leur découverte et aux rôles essentiels qu’elles jouent dans la nature. Les autrices proposent aussi une lecture à plusieurs niveaux, les mauvaises herbes sont des étrangères qui enrichissent nos talus et nos jardins, et tout ce que leurs présences nous apportent.
Présenté comme une petite encyclopédie, Mauvaises herbes est un album qui devrait toujours se trouver dans la bibliothèque des enfants des campagnes comme des villes. Des textes précis et légers racontent les histoires secrètes de ces anarchistes des jardins à la française joyeusement croquées sur des doubles pages horizontales. Les habitués de 64_page connaissent, Noelia Diaz Iglesias – parfois sous le pseudo de SylloDiaz – ses dessins généreux, plein d’humours et sa liberté de traits et de représentations, une dessinatrice, elle-même, un tantinet mauvaise herbe.
C’est l’ouvrage nécessaire pour apprendre à découvrir, reconnaître et aimer ses fameuses mauvaises herbes, qui, outre une double page pratique sur la cueillette et la création d’un herbier, propose une vingtaine de planches descriptives du coquelicot, de la pâquerette, du pissenlit et autre bouton d’or.
Mauvaises herbes, Pauline Payen & Noelia Diaz Iglesias, éditions Panthera, 2023, 16€50.
Remedium : Isidore et Simone, juifs en résistance
Remedium est un dessinateur engagé au plus près de la vie de ceux et celles que les secousses de la vie – et leurs idéaux – font, parfois, des héros et des héroïnes. C’est l’histoire d’Isidore et Simone, les grands-parents de l’écrivain Simon Louvet. Celui-ci a consacré trois années de sa vie à réunir les traces et les documents de leurs vies. Il y a un an, Remedium l’a rejoint pour scénariser et dessiner ce travail historique.
Fuyant la Turquie Ottoman et violente avec ses minorités, Hayim et Rachel sont arrivé en France en 1910, Hayim devient Victor. Et le couple ouvre un atelier de tailleur à Marseille où va naître en 1912, Isidore.
En 1914, menacé d’être arrêté et confiné dans un camp avec tous les « ennemis » réfugiés en France, les allemands, les autro-hongrois et les ottomans, ils décident de fuir à Barcelone et ne reviennent à Paris qu’en 1919…
C’est aux scouts d’Israël que « Gazelle rapide » rencontre « Panthère tenace » et commencent leur histoire d’amour et de résistance… Une saga familiale qui s’inscrit dans la grande histoire. Un album nécessaire.
Isidore et Simone, juifs en résistance – Remedium & Simon Louvet – Éditions Ouest France – 192 pages - 19€50 – 2023
Sara Gréselle : Le sourire d’Yvon Quokka
Dans la famille Quokka, tout le monde sourit et d’un large sourire jusqu’aux oreilles. Dans cette famille, l’activité principale, quand ce n’est pas chanter et danser, c’est inventer des blagues. Et des blagues cette famille de marsupiaux en a plein les poches 😊.
Jusqu’au jour où le petit Yvon Quokka arrive, il a le sourire inversé ☹ ! C’est l’effroi dans la famille Quokka qui essaie de se rassurer, il finira bien par sourire et à ses 6 ans, il devra raconter sa première plaisanterie… Mais au désespoir de la famille, et à la colère de son père Hyppolyte, Yvon n’y arrive pas…
Vous vous doutez qu’Yvon finira par sourire, mais quand, comment ? On ne va pas divulgacher le plaisir et le suspens de cette belle histoire aux couleurs douces, lumineuses, riantes. Sans y toucher, Sara Gréselle aborde la différence – le droit d’être différent – et le poids de la tyrannie du groupe, même s’il prône le sourire, l’humour, l’amusement permanent. Derrière l’astuce du rire, du sourire et tout en finesse, l’autrice touche à ce qui peut être perçu comme du harcèlement. Pour la victime en tous les cas.
Le sourire d’Yvon Quokka, Sara Gréselle, Versant Sud éditions, 2023, 15€50.
Romane Armand : Le Chagrin du Cairn
Anouk et Nelle, deux adolescentes de 16 ans parcourent la montagne pour rejoindre Lou et des militants qui luttent contre le bétonnage de la montagne et, donc, sa destruction. Les glaciers disparaissent les uns après les autres, les jeunes militants vont rendre un hommage à un glacier déjà disparu et, aux cris de « Pour le paysage. Pour l’impalpable », s’engagent à protéger les lacs qui se forment à leurs pieds.
Non seulement, Romane Armand nous offre un magnifique regard sur la montagne, des paysages énormes, sauvages et puissants témoignent de la beauté de ce monde que nous détruisons, mais elle nous propose d’aller à la rencontre de ces jeunes militants. Partager leurs engagements pour la Planète, leurs questionnements et, parfois, les doutes de ceux et celles qui ont choisi de vivre en autarcie dans des installations précaires menacées par les bétonneurs.
Romane nous rappelle que la montagne est belle et que notre jeunesse réfléchie, joyeuse et magnifique est porteuse de tous les espoirs du Vivant.
Un cairn est une pyramide de pierres, point de repère élevé par les alpinistes. Comme cet album.
Le Chagrin du Cairn, Romane Armand, En 3000 éditions, 2023, 20€.
Sara Gréselle : Silva
Un arbre parle :
Je pousse
Je continue de pousser malgré moi
Quelque chose de plus fort que moi me prolonge jusqu’au ciel.
Avec Silva, Sara Gréselle nous propose une petite plaquette très personnelle où elle nous livre un long poème sur un arbre et sa vie qui est, comme toutes les vies, à des moments difficiles et vit une épreuve qu’il lui faudra franchir pour poursuivre sa vie.
L’écriture de Sara Gréselle est sensible, parfois sèche, parfois douce, elle est pénétrante, décapante elle approche toutes les aspérités de l’écorce, touche aux flux de la vie et de la non vie. Les dessins en noir et blanc de l’autrice sont eux aussi précis, mystérieux et vivants, ils nous emmènent au cœur du vivant, au plus intime, de cet arbre tellement proche, tellement humain. Tellement femme.
C’est un cadeau que nous offre l’autrice en poétisant une expérience vécue et sûrement partagée par de nombreuses femmes. C’est un acte sensible et aussi, de nos jours, très politique. Merci Sara.
Silva, Sara Gréselle, & esperluète éditions, 2023, 11€90
Romane Armand & Éléonore Scardoni : Nettwerk
« En résidence artistique à la KH Messen à Ålvik dans le fjord Hardanger, Romane et Éléonore passent un mois en autarcie. Trente jours, elles savent une chose : elles se feront arrêter que ce soit du côté du récit ou du temps de création. Il y a un point d’orgue à cette escapade elles décident de jouer le jeu, s’enivrer du paysage, devenir personnage de l’autre, et se mettre en scène, dessiner et raconter… ».
Voici comment les autrices présentent cet album expérimental, imprimé en 55 exemplaires, qui deviendra vite un objet collector. Qui sera très certainement, dans quelques années, recherché par les fans d’Éléonore et de Romane.
Dans Nettwerk, elles racontent leurs passions pour la nature, les oiseaux, le grand Nord,… Et leurs engagements de militantes tant dans leur art, le Neuvième que dans leur quotidien… Une étonnante chasse aux femmes qui protègent la Terre par ceux qui œuvrent à son pillage permanent.
Nettwerk, Romane Armand & Éléonore Scardoni, exclusivement en commande chez En 3000 éditions, 2023, 23€
Juan Mendez : L’Amérique contre la montre 1/2
Résident à Bruxelles, Juan Mendez dessinateur d’origine espagnole participe régulièrement à la Cartoons Académie Cécile Bertrand avec des dessins politiques très mordants. Il publie sa première BD chez un éditeur de Barcelone, Bang ediciones. Un premier album décliné en espagnol, en catalan et en français.
Morgan Ludd, un jeune ado de 14 ans, est sélectionné par une agence de tourisme pour découvrir et faire connaître l’Amérique du Sud et l’agence Travel Sky. Le défi est d’autant plus impressionnant que Morgan doit aller de Cancun à la Patagonie sans utiliser de moyens de transports motorisés.
Cette quête aux accents écologiques très prononcés, outre découvrir du pays, est aussi l’occasion pour Morgan de découvrir de nouveaux amis et un premier amour.
Le dessin de Juan Mendez est enlevé, dynamique, rencontre les préoccupations et s’adresse parfaitement, avec humour, aux rêves et questions des jeunes publics visés, les 9 – 13 ans environs.
L’Amérique contre la montre (tome 1 sur 2) – Juan Mendez – Bang ediciones – juin 2023 – 17€
Mathilde Brosset : Ribambelle
C’est Carnaval, les enfants se déguisent. Tous les enfants ? Non, Nils pleure, il n’a pas de déguisement.
Clic clac clic, les ciseaux coupent les tissus soyeux et colorés… Jeanne, Sacha, Joséphine, Clarence, Louise, Victor, Soumaïa et Colombine s’unissent et réalisent le plus beau costume du Carnaval : celui d’Arlequin.
Les albums de Mathilde Brosset s’adressent aux petits, aux tous petits, ceux qui dans la douceur du giron de leur maman, regardent les images, s’enchantent des couleurs, des découvertes en écoutant sa voix, que l’on sait douce, raconter cette merveilleuse histoire éclatée de couleurs, de lumières,… Le bonheur se partage, les enfants l’ont compris.
Mathilde Brosset apprend aux enfants à aimer les livres, leurs univers chatoyants, les récits des aventures de ces personnages merveilleux que sont les enfants… Mais pas que, dans ses albums la câline et coquine Mathilde parlent toujours de l’indispensable solidarité, du vivre ensemble, de l’équité, du respect des différences.
Ribambelle, Mathilde Brosset, éditions Versant Sud, novembre 2022, 16€
Mathilde Brosset : La Galette
La créativité et l’imagination de Mathilde Brosset n’est plus à démontrer, sa capacité à nous surprendre et à passionner son public non plus !
Ses albums sont toujours construit sur des traditions, ici la galette des Rois, et son approche est délicate, toujours subtile, décalée en pleine d’humour. La reine souhaite sa galette et Denis, son cuisinier, va lui préparer cette galette très spéciale, accordée au goût royal. L’autrice nous entraîne dans une course endiablée, la reine et Denis doivent réunir les nombreux ingrédients pour satisfaire le royal caprice et charmer les royales babines. Réglé comme un ballet de couleurs et d’humour, la recette s’élabore devant les jeunes lecteurs et lectrices. Mathilde travaille le collage et développe un langage visuel coloré, et fait le choix d’user de peu de mots. Un langage poétique, toujours simples et efficaces, adaptés à un jeune public dès 4 ans.
En fin de l’album, la recette originale permettra aux plus gourmets de la réaliser « La » galette en vrai.
Cette galette des Rois n’aura plus jamais le même goût pour celles et ceux qui auront découvert ce fabuleux moment de la galette de Reine.
La galette, Mathilde Brosset, éditions étagère du bas, sortie 6 janvier 2023, 15€
Noelia Diaz Iglesias : Plein phare sur les Balbuzards
Elaia, Jonas et Merlin, comme chaque été, retrouvent la plage de la Grande Baie et se réjouissent de poursuivre leur découverte des oiseaux. Mais cette année, tout est différent les oiseaux ne sont pas au rendez-vous. Pis, les enfants trouvent de nombreux cadavres d’oiseaux, seul un petit passereau est toujours vivant. Il est recueilli par les gamins, qui l’appellent Hayato, et le confient à deux jeunes étudiants en ornithologie, Joséphine et Nils, inquiets eux aussi de la disparition des oiseaux. Une grande enquête commence…
L’histoire imaginée par Nancy Guilbert est illustrée par Noelia Diaz Iglesias nous entraîne, à la suite de nos trois petits détectives, sur le rôle néfaste et dangereux des lumières artificielles sur la vie des oiseaux migrateurs. Les dessins libres, simples et lumineux comme le soleil d’automne fourmillent de mille détails qui réjouiront ou intrigueront les jeunes lecteurs. Ceux-ci peuvent y trouver une source d’inspiration pour enrichir leurs vacances par des découvertes de la nature et des oiseaux. Un court dossier explicatif conclut ce bel album.
Plein phare sur les Balbuzards, Nancy Guilbert & Noelia Diaz Iglesias, chez Kilowatt, enquête graphique, novembre 2022, 16€50
Thé au Vinaigre : Kernel Stigmas
Dans notre numéro 21, Lorraine Cacheux, sous son pseudonyme « Thé au Vinaigre », nous présentait huit pages de son projet au long cours Kernel Stigmas. (À voir sur 64_page.com, à l’onglet « Revues ») « 1815, Audrey se retrouve dans un monde où elle peut enfin s’épanouir en tant que doctoresse. Mais au fil de ses rencontres, sa nouvelle vie sera bouleversée… Étrange, sombre et doux à la fois, Kernel Stigmas est le pilote d’une série de deux trilogies », voilà comment le projet était présenté à nos lecteurs. Cet épisode pilote était annoncé pour un financement participatif à venir sur la plateforme Ulule, réalisé depuis avec succès : aujourd’hui, le livre existe ! Il a été écrit après l’entièreté de la trilogie qui suivra et « cela signifie que ce tome cache bien plus de choses qu’il n’y laisse paraître… », nous dit l’autrice en introduction de l’ouvrage. Les lecteurs pourront y trouver des indices sur l’œuvre en devenir, et surtout rencontrer les protagonistes qui animeront Kernel Stigmas.
Kernel Stigmas, Thé au Vinaigre, à compte d'auteur the.au.vinaigre@live.fr , 20€
Patrice Réglat-Vizzavona & Philippe Donadille : Djemnah, les ombres corses
Patrice Réglat-Vizzavona a été publié par 64_page – Le Cribble, revue #4 – dès 2015. Il est aussi l’auteur de la splendide couverture du 64_page #22 « Polar » (janvier 2022). Déjà l’auteur, en solo, du magnifique Le passager. Cette fois, c’est le récit de Philippe Donadille que Patrice Réglat-Vizzavona a illustré avec un dessin – des aquarelles, parsemées de dessins au trait, de planches en bichromie ou en noir et blanc – somptueux, qui nous fait découvrir la Corse au travers d’un petit village, écrasé de soleil, coincé entre mer et montagnes. L’enquête menée par Ange nous fait voyager dans les temps et entre vérités et fictions.
Le Djemnah est la maquette d’un bateau qui a réellement existé et qui a coulé, emporté par un cyclone au large de Madagascar. Donadille le fait torpiller au large de la Corse par un U-Boot allemand en 1918. Les auteurs construisent un récit haletant mais aussi intime, intérieur. Tous deux nés sur le continent, ils ont des racines corses mais n’avaient jamais été sur l’île de leurs ancêtres, même en vacances. Djemnah, les ombres corses est aussi une histoire initiatique.
Djemnah, les ombres corses,Philippe Donadille & Patrice Réglat-Vizzavona, Éditions Delcourt, 24 € 95
Dina Melnikova : Cahier d’été
Avec sa reliure cousue et sa couverture souple à rabats, on dirait un cahier. En couverture, un dessin en noir, énigmatique, un titre à la typo tout aussi mystérieuse. Cahier de recettes, cahier de souvenirs ? Plutôt les deux même si Soirée d’été, le premier album jeunesse de Dina Melnikova, s’ancre dans le présent. La fin d’une chaude journée plonge la narratrice dans les tendres souvenirs qu’elle a avec sa grand-mère.
Quand elles observaient la nature, les arbres, les pissenlits, le lièvre, les hirondelles… Une nature qui est toujours présente aujourd’hui et entre en dialogue avec les illustrations, en noir, qui l’évoquent aussi, sur un mode graphique et poétique. Le charme opère, on se laisse saisir par les interactions entre les dessins et le texte, on savoure cette soirée d’été reliant hier à aujourd’hui, projetant aujourd’hui dans demain, qu’on ait six ans, qu’on soit ado ou adulte. (L.C.)
Dina Melnikova, Soirée d’été, CotCotCot éditions, 32 pages, 19,90€
Sara Gréselle : Les lundis de Camille
« Tout le monde est un génie. Mais si vous jugez un poisson sur ses capacités à grimper à un arbre, il passera toute sa vie à croire qu’il est stupide. »
L’album s’ouvre sur cette réflexion d’Albert Einstein et le ton est donné, Sara Gréselle présente Camille une petite fille qui n’aime pas trop l’école. Pas parce que apprendre ne l’intéresse pas, mais parce qu’elle a un professeur, monsieur Bourgon, qui vraiment ne la comprend pas. Il ne perçoit pas ses qualités qui ne sont ni le calcul, ni la grammaire. Camille a un talent qu’elle a décidé de travailler !
Beaucoup de petites filles et de petits garçons se retrouveront dans cette relation compliquée avec un professeur. Racontée à hauteur d’enfant, cette histoire traumatisante nous l’avons toutes et tous vécue, Sara Gréselle nous dit le ressenti de Camille, sa mise à l’écart, son humiliation, son déclassement. A lire par les enfants, les parents et les profs !
Les lundis de Camille, Sara Gréselle, Versant-Sud Jeunesse, 14€90. 09/2022
Quentin Lefèbvre : Et si j’étais président…
Quentin Lefèbvre a publié une première BD courte – Comment rendre le monde meilleur, discussion sur la pollution de l’air – dans 64_page #10 en 2017, originaire de Savoie, il a étudié la bande dessinée à l’École Supérieure Artistique Saint-Luc de Liège. En dehors de sa série Handman, Quentin est un dessinateur préoccupé, comme nombreux jeunes de sa génération, par l’avenir de notre planète, par l’avenir que nous réservons aux plus jeunes et aux enfants. Dans Et si j’étais président…, il montre que les jeunes générations sont bien plus engagées que les médias et les résultats électoraux veulent le montrer. À travers son cheminement personnel et ses questionnements, Quentin propose des pistes claires et réalistes sur les choix écologiques, climatiques, sociaux, sociétaux urgents et nécessaires.
Des idées claires, un dessin clair, même ligne claire, un langage simple et efficace Si j’étais président… peut être mis dans toutes les mains, dès 9 ans. Même si le titre peut paraître très républicain, l’album peut être lu en monarchie, donc en Belgique notamment.
Et si j’étais président…, Quentin Lefèbvre, autoédition disponible en librairie – 19€
Michel Di Nunzio & Henri Vernes – Singleton – Rendez-vous au Pelican vert
Il y a des soirs d’orage où l’on se réjouit de vibrer aux fulgurances des éclairs et aux roulements de la foudre. Michel Di Nunzio a débarqué dans 64_page avec ses magnifiques univers étranges : Fata Morgana (64_page #21) et La bonne cause (#22) éblouissent et bousculent ses lecteurs. Les Éditions du Tiroir lui ont proposé d’illustrer un roman d’Henri Vernes, prélude d’un défi bien plus imposant, l’adaptation en BD, avec Alain Dekuysche, d’un roman du même Henri Vernes dont la parution est annoncée pour juin 2023.Michel Di Nunzio illustre aussi le jeu de rôle Horrifique autour de l’univers de H. P. Lovecraft (https://www.gameontabletop.com/cf773/horrifique).
Singleton – Rendez-vous au Pelican vert, Michel Di Nunzio & Henri Vernes, Éditions du Tiroir. Dans la même collection, les éditions du Tiroir publient aussi un autre roman de Henri Vernes, illustré par Vincent Grimm (Mauvaises langues dans 64_page #22) : Luc D’Assault – Les rescapés de l’Eldorado.
Debuhne : Le goût du sang
Un homme plutôt patibulaire escalade une falaise, sa chemise blanche est tachée de sang. Il s’allume une cigarette, à l’arrière-plan une carcasse de voiture brûle. Il se dirige vers une ferme isolée. Dans la cour intérieure, une jeune femme tranche la tête d’un poulet… Le goût du sang démarre sur les chapeaux de roues et nous entraîne, à la suite d’un ancien taulard, dans un monde de truands, de mafiosi, de politiciens corrompus, qui s’affrontent autour de Lou, celle qui décapite des poulets et qui a, aussi, refroidi et congelé son homme. Le sang, la violence et l’humour débordent de toutes les cases. Hémoglobine partout !
Debuhne signait Philippe Baumann quand il a publié Sissi à bicyclette dans la revue 64_page #10 en 2017. Ses planches brillaient déjà par leur mise en page aussi efficace qu’originale et par la psychologie de ses personnages, même et surtout secondaires auxquels ils offrent une gueule, une épaisseur tout en nuances. Ils sont méchants et bêtes, cruels et corniauds, violents et drôles. Avec Le goût du sang, Debuhne nous plonge dans un univers décalé, dingue, sensible et même tendre. Une réussite qui peut rappeler l’humour et l’ambiance des Pépés flingueurs.
Le goût du sang, Debuhne, Le Lombard, 18 €.
Sandro Cocco : Exquises Nouvelles d’autres Mondes
Le coronavirus et ses enfermements ont parfois eu du bon. Contrainte d’annuler ses ateliers d’écriture, l’association Villages du Monde s’est associée au Centre culturel de Rochefort pour un projet d’édition. En partant du moyenâgeux « jeu des queues » – connu depuis les surréalistes sous le nom de « cadavre exquis » –, les initiatrices de ce projet d’écriture ont réuni 29 auteurs et leur ont proposé un défi : la dernière phrase de la première nouvelle, devient le début de la seconde et ainsi de suite…
Résultat ? 29 nouvelles qui se relient l’une à l’autre tout en nous plongeant dans des univers totalement différents.
L’édition propose deux volumes, le premier les nouvelles, le second 29 illustrations de Sandro Cocco. Chaque semaine, le mercredi, Sandro Cocco recevait une nouvelle qu’il devait illustrer pour le mardi suivant à minuit. Défi réussi par cet artiste multiple et rochefortois d’adoption, qui avait publié Le carton à dessin et Le peintre dans la revue 64_page #11.
Exquises Nouvelles d’autres Mondes,29 écrivains et Sandro Cocco, Centre culturel de Rochefort, 2021,15 €, commande : www.ccr-rochefort.be.
Mathilde Brosset & Ludovic Flamant : La dame aux 40 chats
Dans un décor, une pièce d’un appartement qui semble définitivement figé, une dame rêve. Elle imagine le chat parfait ! Et voilà que l’on frappe à sa porte, et c’est un chat… Les auteurs, Ludovic Flamant et Mathilde Brosset, n’en sont pas à leur premier album, même si c’est leur première collaboration, ils sont aussi connus des lecteurs de 64_page.
Mathilde Brosset, comme à son habitude, crée une collection de chats hauts en couleurs que les plus petits prendront un réel plaisir à découvrir et à suivre au fil des pages. Chacun a sa personnalité et ce petit défaut qui n’en fait pas le « chat parfait » espéré. Mais personne n’est parfait dans ce monde, ni les félins ni surtout les humains. Mais tous seront acceptés et chacun aimé pour ce qu’il est et apporte.
Dans cet album destiné aux très jeunes lecteurs, les auteurs proposent une réflexion sur l’altérité, la différence, l’acceptation de l’autre, comme il est, pour ce qu’il est et ce qu’il peut donner. Un album à plusieurs niveaux de lecture à raconter aux petits, ou à lire avec les plus grands.
La dame aux 40 chats,Mathilde Brosset et Ludovic Flamant, collection Pastel, Éditions École des Loisirs, 2022,14 € 50.
Éléonore Scardoni : La grande UTÖ
En septembre 2016, Éléonore SCARDONI publiait UTÖ dans la revue 64_page #8, un court récit de 4 pages autour d’observateurs d’oiseaux. Cinq années se sont écoulées, et Éléonore Scardoni nous propose La grande UTÖ, un album de 120 pages, résultat de voyages en Finlande, en Norvège, d’un séjour dans l’archipel de Turku. Cet album est la rencontre entre un îlot battu par les vents et les flots et les questionnements d’une dessinatrice sur la place que l’Homme s’approprie au sein de la nature.
Ceux qui se sont arrêtés à La ligne claire seront déroutés, les autres se laisseront porter par le récit et un dessin que les vents éparpillent en questionnements ou regroupent en évidences. Les rencontres entre le rocher aride, inhospitalier et fascinant, et les corps fragiles, nus des humains sous l’œil étrange et goguenards des « plup », les étranges créatures qui peuplent Utö. Les oiseaux, superbes, animent quasi toutes les planches d’une magnifique rencontre entre un îlot d’apparence désolé, désséché, et la force vitale et généreuse de la dessinatrice. Une histoire d’amour, d’intime.
La grande UTÖ, Éléonore Scardoni, En 3000 Éditions, 2021, 23 €, commande : www.forgeries.be.
Yohan Colombié-Vivès : La grippe. Un virus, des canards et des hommes
Dans cette interminable pandémie, les éditions ecp-sciences ont eu l’excellente initiative de sortir un album sur la grippe.
La collection Carnet de labo associe un scientifique, Pierre Bessière, et un artiste, Yohan Colombié-Vivès pour vulgariser un sujet scientifique forcément complexe.
En abordant la pandémie du Covid par la grippe qui en est la forme la plus banale et la plus connue, puisque annuelle, les auteurs rappellent que la grippe dite « espagnole » est à l’origine de la pire pandémie que l’humanité a connue.
L’éditeur propose l’âge de 16 ans, mais les dessins joyeux, voire espiègles, rendent les textes accessibles à tous et notamment aux enfants accompagnés d’un adulte. Et ces derniers découvriront et apprendront, aussi, beaucoup sur ce virus et ces variants qui remplissent nos médias de contre-vérités et d’inepties.
Une lecture qui joint l’utile à l’agréable et redonne à la raison sa juste place dans nos gestes quotidiens.
La grippe. Un virus, des canards et des hommes, Pierre Bessière et Yohan Colombié-Vivès, ECP sciences collection Carnet de labo. 80 pages, 19€.
Noelia Diaz Iglesias : Un ouragan dans la barbe
Les habitués de 64_page connaissent Noelia Diaz Iglesias, qui signe aussi Syllo D., pour ses dessins d’une liberté totale et ses scénarios enlevés, plein d’humours et de drames. Pour son premier album ; elle nous propose une rencontre, celle de Hugo, qui n’a pas reçu le prénom d’un ouragan par hasard, et de son Papy. Celui-ci s’exprime dans la langue des signes, ce qui n’est pas simple et sa longue barbe ne simplifie rien. Hugo est aussi intrigué par les mystérieux outils et l’atelier du Papy.
En cinq journées, cet album raconte cette découverte familiale modérée par la maman d’Hugo, fille de Papy. Noelia Diaz Iglesias propose le plus souvent des doubles pages où l’action se déroule à plusieurs niveaux, dans l’espace et dans le temps. Elle donne à ses pages des mouvements tourbillonnants où virevolte toutes la gamme des sentiments qui unissent et, parfois, désunissent les trois personnages.
Loelia Diaz Iglesias invente la ligne multiple, ou mieux La ligne délicate, ses approches multiples des situations et des personnages nous permettent de découvrir les différentes facettes de leurs pensées les pus intimes.
Un ouragan dans la barbe, Noelia Diaz Iglesias, CFC collection 7/107, 128 pages, 18€.
Iason Saitas : Reflet
Un album concept qui mêle astucieusement une rencontre et une séparation, des espoirs et des déceptions, des choses de la vie, dans deux villes.
Les pages de gauche, en dominante orangée, racontent les premiers pas d’un amour de deux étudiants en Erasmus à Shanghai. Dans des tons à dominantes vertes, les pages de droite, qui se déroulent à Montmartre, racontent les mêmes qui se revoient et buttent après une séparation vécue, visiblement, différemment. Par petites touches, les personnages se révèlent en finesse. Une nouvelle de 32 pages bien menée par l’astucieux Iason Saitas qui réussit à rendre son album lisible de trois manières différentes : par les oranges, les verts ou par les deux ensemble.
Reflet, Iason Saitas, Vite, autoproduction à commander chez l’auteur iasonsaitas@gmail.com, 12€.
Élodie Adelle : Le bonnet vert
Un premier album jeunesse pour Élodie ADELLE. Lucie fait un bonhomme de neige mais le vent emporte son bonnet. Elle court, elle court pour le rattraper. Un peu plus loin, elle se retrouve face à un ours… L’aventure commence pour Lucie !
Élodie nous avait habitué à un dessin réaliste qu’elle nous avait proposé dans 64_page : Le grand voyage (extrait) dans la revue #14 et Au bout du fil dans le #11.
Avec Le bonnet vert elle nous offre une autre palette de talent, un dessin pensé pour son très jeune public, simplifié, spontané et dynamique. Une magnifique histoire de quête et de découverte pour les enfants à partir de 4 ans.
Élodie Adelle, Le Bonnet Vert, Atramenta novembre 2020, 36 pages quadri, couverture souple, 14€. Dès 4 ans.
Adley : Galactik Jungle
Galactik Jungle est un curieux et bel objet pour passionnés de BD et pour bricoleurs spatio-temporel. Composée de deux parties dessinées – une signée Félix Bizyo, l’autre signée Adley – et d’une maquette pré-découpée au laser et à monter soi-même conçue par Arnaud Yperzeele.
C’est un livre-objet nous racontant un voyage sur une planète étrange sur laquelle semble planer une malédiction. Alan rend visite à sa famille, se rend compte que quelque chose de terrible est arrivé en son absence et part à sa recherche. Cette histoire a un goût de série B : des monstres, de la science-fiction et un ton léger.
Galactik Jungle – Adley et Félix Biziau avec Arnaud Yperzeele, Spectre-éditions, 44 page, maquettes. Autoédition de 100 exemplaires numérotés. 35€. https://spectre-editions.ecwid.com/Galactik-Jungle-p214296877
Sara Gréselle : Les souvenirs et les regrets aussi
Comédienne, marionnettiste, dessinatrice,Sara Gréselle nous avait déjà montré ses talents de graphiste avec Cousines (64_page #18) et l’album Bastien, ours de la nuit.Avec Les souvenirs et les regrets aussi, elle dévoile ceux de poètesse.
lle se place d’emblée sous l’aile de Jacques Prévert, mettant en exergue son vers le plus connu « Les feuilles mortes se ramassent à la pelle » et toute sa jeune nostalgie. Rythmé par des mecs numérotés, le récit de Sara narre des amours, des rencontres, des partages, des séparations… Au fil des pages, de textes poétiques et de dessins fins, subtiles, suggestifs, une jeune femme dévoile ses désirs, ses appétences, sa vulnérabilité. Chaque double page se décline par un texte et un dessin ponctué par une feuille morte, note poétique, décalée et humoristique.
Ce petit récit à mettre dans toutes les mains adolescentes est riche d’une vie douce, parfois chagrine mais toujours tendre et porteuse d’espérances amoureuses. La vie est un plaisir et c’est à nous de le créer.
Les souvenirs et les regrets aussi, Sara Gréselle, Esperluète éditions, février 2021, 14 €.
Sara Gréselle : Bastien, ours de la nuit
Chez 64_page, on aime les beaux récits, et on aime encore plus ceux qui racontent quelque chose de notre vie, des valeurs qui doivent la soutenir et nous aider à réfléchir sur notre vivre ensemble. Et c’est d’autant plus vrai quand ces récits s’adressent aux plus petits.
Avec Bastien, ours de la nuit, Sara Gréselle aborde la précarité, la très grande pauvreté. Tous les enfants voient, regardent, s’interrogent sur ces hommes, ces femmes, ces enfants même, qui habitent dans un carton rencogné dans une encoignure, sous un porche, dans un trou dissimulé entre deux vitrines d’abondances. Sébastien est niché, recroquevillé entre ses cartons et quelques haillons, la tête reposée sur toutes ses richesses contenues dans deux sacs en plastique, il dort.Et comme tous les humains, quand il dort, Sébastien rêve, et dans ses rêves, il devient Bastien, un ours, et cet ours parcourt la ville. La nuit ses rêves se réalisent, il trouve des trésors dans les poubelles, il fait des rencontres, il s’associe à un violoniste des rues sans doute aussi abandonné par la société des consommateurs. Ensemble ils récoltent plus de pièces qu’ils n’en avaient jamais vues…
Les magnifiques dessins d’une ville (Bruxelles ?) la nuit à la fin d’un hiver givré de Sara Gréselle offrent, aux plus jeunes lecteurs, une vision poétique et, donc, quasi supportable du drame vécu par Sébastien. Sa réincarnation en ours Bastien permet aux auteurs – le récit sensible est de Ludovic Flamant – d’aborder le vécu de ceux qui vivent l’écrasante pauvreté chaque minute de leur vie.
Un album indispensable que les parents, les éducateurs doivent partager avec les jeunes lecteurs.
Bastien, ours de la nuit, Sara Gréselle et Ludovic Flamant, Versant Sud, 14 janvier 2021, 14 € 50. Dès 4 ans.
Pluie Acide : Poussière
Sous-titré Une histoire presque vraie, l’album de Pluie Acide nous dévoile l’histoire de Julia. « Il s’agit d’un récit qui s’inspire de la jeunesse de ma grand-mère. De son vivant, elle me racontait des tonnes d’histoires datant de l’époque où elle a débarqué à Nice avec sa famille. » Pluie Acide poursuit : « Et puis, ça parle aussi d’amour. C’est à cette époque que Mémé rencontre Pépé. Vous pensez que la vie d’une femme de ménage n’est pas rock’n’roll ? »
Pluie Acide s’éloigne, pas totalement, de son univers habituel composé de monstres moyenâgeux, d’habitants de planètes exotiques, de chevaliers empotés et de nanas bien roulées pour aborder avec tendresse les aventures de sa délurée motarde de grand-mère. Elle, issue des milieux dits « populaires »,va se frotter, tour à tour, à celui des snobinards et celui de la pègre. Avec son trait inimitable, où les droites ne le sont pas plus que les cercles sont ronds, Pluie Acide nous offre aussi quelques jolies vues de sa ville de Nice rêvée, ou pas ?Une belle histoire tendre et bravache. Pluie Acide nous drache le cœur !
Poussière, Pluie Acide, Éditions Même pas peur, décembre 2020, 16 €.
Zam ZADEH : Glad that I came nat sorry la depart
Expérience multisensorielle que l’album « Glad that I came, not sorry to depart » de la jeune artiste iranienne aujourd’hui installée en Flandres Azam Masoumzadeh : on le lit, on regarde les images, on scanne un QR code, les images s’animent en 3D et on entend en farsi, en anglais et en néerlandais des poèmes d’Omar Khayyam. Cet astrologue et scientifique iranien a écrit mille poèmes de quatre lignes, il y a plus de mille ans ! Une poésie proche de la philosophie.
Comme tous les Iraniens, Azam Masoumzadeh a grandi avec les vers d’Omar Khayyam et y a puisé de quoi se faire une vie plus belle. Si son graphisme s’inspire de l’art ancien de la miniature iranienne, c’est une version contemporaine du monde d’Omar Khayyam qu’elle propose en cinq scènes inspirées de poèmes. Drôles ou tristes mais universels et éternels.
Quand hier s’est évanoui dans le passé,
Et que demain s’attarde dans le vaste futur,
Pour ne penser à rien mais apprécier l’heure ;
Car c’est tout ce que vous avez et le temps passe vite.
Yohan Colombié-Vivès : La biodiversité
Yohan Colombié-Vivès a publié Une vie de chien dans le 64_page #14 et vient d’illustrer La biodiversité un splendide album jeunesse pour les 7 à 13 ans.
L’écologie est, aujourd’hui, au cœur de nos préoccupations et singulièrement de celles de nos enfants. Le sujet est vaste et ardu et comme tous les thèmes il peut paraître embrouillé et neutralisé quand les politiques et les médias s’en emparent. Cet album constitué de chapitres courts propose une solide découverte de La Biodiversité : histoire de puis l’antiquité jusqu’aujourd’hui et s’étend des débuts des sciences du vivant jusqu’aux mouvements de défenses de la nature qui dressent un état des lieux très préoccupant.
Les illustrations de Yohan sont éclatantes de couleurs, de poésies, d’humours, de saynètes décalés et engagées. L’illustrateur prend la défense de la nature et des animaux, même des peu sympathiques, et les bulldozers qui détruisent la forêt et les usines polluantes ont des visages humains… Le talent de l’illustrateur contribue à rendre ce bel album accessible aux plus jeunes.
La Biodiversité Yohan Colombié-Vivès et Julie Lardon pour les textes. Mats 2020, 15€. Collection Mondes futures du Petit journal illustré Albert de l’éditeur La Poule qui pond.
REMEDIUM : Cas d’école, histoires d’enseignants ordinaires
Un « cas d’école », c’est, habituellement, un « cas correspondant au modèle théorique enseigné ». Quand l’auteur-illustrateur français Remedium l’utilise, en titre de son nouvel album, « Cas d’école, histoires d’enseignants ordinaires » (Equateurs, 100 pages, 15 euros), c’est en prenant son sens a contrario. Les quatorze histoires qu’il consigne dans sa bande dessinée sont terribles, révoltantes. Des histoires d’enseignants, d’enseignantes, en classe ou dans le bureau de direction, qui ne croient plus à l’école publique, qui n’ont trouvé d’autre issue que de s’effacer. Dépressions, suicides, parfois mentionnés par les médias, étouffés par l’Education nationale française.
Remedium, Christophe Tardieux de son vrai nom, sait de quoi il traite. Il est lui-même professeur des écoles. En Seine-Saint-Denis. Il a été confronté à une histoire terrible. A vécu la violence hiérarchique qui cache, enterre, ignore, blesse et met en colère. Car c’est bien la colère et la révolte contre un système qui écrase qui relie ces récits. Enseignant le jour, dessinateur le soir, Remedium publie sur Facebook ses bandes dessinées dénonciatrices. Révélation de la crise que vit la profession, travail de mémoire pour que ces morts ne soient pas vaines. Il a ajouté des histoires inédites pour l’album. Effroyables destins que ceux de Jean, Laurent, Sabrena, Manal, Chloé, Christine, Jacques, Annie, Fatima, Rachida, Jean-Pascal, Christophe et Cécile, pleins d’idéal et d’enthousiasme, broyés par la machine administrative orchestrée par le ministre Jean-Michel, l’avant-dernier des portraits.
Cas d’école, histoires d’enseignants ordinaires, Remedium, Équateurs. Septembre 2020 Site de Remedium : http://lacitedesesclaves.org/ et son blog sur médiapart : https://blogs.mediapart.fr/remedium/blog
Aurélie Wilmet : Rorbuer
64_page a eu le bonheur de pré publier un extrait de Rorbuer dans notre #11 à la mi 2017. Nous avions été impressionné par la maturité graphique d’Aurélie Wilmet et, aussi et peut-être surtout, par son sens du récit. Voici comment elle présentait son travail : « l’histoire se situe dans un village nordique où les mythes et légendes gèrent le quotidien des villageois. Des croyance où la mort physique des hommes en mer n’est pas le dernier stade de leur être (…) »
Construite sur son vécu, un voyage aux confins du Nord à bord du ‘Fram’ et un séjour sur une ile quelque part entre Kristiansand et Mandal. Aurélie nous dit y avoir appris la pêche en mer et le séchage du poisson mais aussi les légendes nordiques.
Robuer est un splendide album dont l’histoire dure et mystérieuse est remarquablement peinte et suggérée par des couleurs fortes où domine la gamme des rouges, du rose sang à l’incandescence des incendies. Aurélie nous ravit par les chaleureux paysages du village aux petites maisons pourpres jetées sur les plaines de verts primesautiers bordés du bleu-gris d’une mer forte et violente. Et soudain, nous glissons dans la rage tumultueuse de la mer et des hommes. Un album à découvrir absolument.
Robuer, Aurélie Wilmet. Super Loto Éditions. 20€. Sorti en juin 2020.
Xan HAROTIN : J’ai décidé de changer !
Cette phrase, nous l’avons sans doute tous dite un jour à un amour déçu : « J’ai changé. »
C’est aussi ce que dit l’héroïne de cet album, une petite souris avec une superbe écharpe rouge. Elle est bien entourée d’amis mais elle se sent si petite, perpétuellement menacée par de gros animaux à grosses pattes, à commencer par les gros pieds des humains. Elle décide de changer et deviendra tour à tour oiseau, serpent, chien, chat, éléphant, baleine…
Toutefois, elle découvre très vite les inconvénients de ces nouvelles conditions. Être un chat quand tous vos amis sont des souris, c’est pas facile à vivre pour ces derniers. Ni pour vous d’ailleurs !
En définitive, la petite souris décide de rester la petite souris qu’elle devait être ! Incroyable Xan Harotin qui glisse du Friedrich Nietzche – Deviens ce que tu es – dans un album destiné aux bambins de 3 ans.
Xan est une magnifique dessinatrice d’animaux. Son trait simple, épuré, et ses couleurs lumineuses, sont conçues pour son jeune public. Un album à raconter, à lire et à mettre dans toutes les petites mains.
J’ai décidé de changer, Xan Harotin. L’étagère du bas, 12€90 - Janvier 2020
Romane Armand, Éléonore Scardoni, Antoine Carcano et Loïc Perillier : Forgeries n°2 « Variation catabatique »
Très attendu, le deuxième tome de Forgeries est un véritable régal visuel et poétique. Forgeries raconte les aventures d’un groupe d’explorateurs internationaux. Les deux meneuses de ce projet, Romane et Éléonore, ont renouvelé la partie masculine de l’équipe mais le nouvel équipage de la bent-base est toujours aussi efficace, tant dans la description du projet scientifique et technique des engins utilisés, que dans la peinture des paysages et des habitants, des manchots volants…
Romane, Éléonore et Antoine ont publié dans les 64_page #9, #2 et #1.
Forgeries, N°1 « Construction de l’Exploratoire », a reçu le prix littéraire de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour la première œuvre en bande dessinée en 2019. Forgeries N°2 « Variation catabatique », Romane Armand, Éléonore Scardoni, Antoine Carcano et Loïc Perillier, Autoproduction, 25€. 176 pages – Quadri, 19 × 27 cm, janvier 2020 Commande sur www.forgeries.be
Pluie Acide : Sabordage
Avec Sorcière, Pluie Acide était parmi les quatre pionniers publiés en septembre 2014 dans le #1 de 64_page. Il avait déjà ce style touffu et ce dessin totalement libre au service de son imagination débridée et nourrie par son regard déjanté sur le Space Opéra.
Les héros de Sabordage sont l’audacieuse Monique et le reptilien Maurice ! Ah oui, nous ne vous avons pas précisé que cette aventure se déroule dans un temps futur, une époque où humains et extraterrestres fricotent dans toutes les cases de la galaxie !
Sidérant et hors du train-train de la BD spatio-temporelle, Pluie Acide nous emmène dans une quête désopilante du trésor de ce vieux Bill que convoitent, aussi, les forces maléfiques de la planète Japet…
Si votre avenir vous intrigue, prenez le temps de regarder tous les détails de chaque case, Pluie Acide vous révélera votre futur.
Sabordage, Pluie Acide, éditions Même pas mal, 2020.
Mathilde Brosset : La ballade de Lino
Lino est un voyageur. De village en village, il joue de la guitare et chante sa chanson en échange de quelques pièces ou d’un repas chaud. Mais que ce soit chez les poissons, les moutons, les hérons ou les caméléons, tous regardent d’un œil noir ce vagabond, cet étranger qui ne leur ressemble pas.
Mathilde Brosset avec ses splendides collages et son humour tendre et poétique aborde, pour les petits à partir de 5 ans, le racisme, la peur du différent, de l’autre…
On s’en doute, au fil de sa pérégrination, partout où il passe, Lino rencontre de nouveaux compagnons qui, petit à petit, prennent la route avec lui. Au fil de l’album, la petite troupe grandit et forme un hymne à la diversité, à cette différence qui fait la richesse de l’autre, de l’étranger…
Un album à offrir à ses petits et à ceux des autres, des différents…
La ballade de Lino, Mathilde Brosset, Versant Sud, collection Les pétoches, 15,90€, 40 pages, quadrichromie. À partir de 5 ans.
REMEDIUM : Adam, l’atraction
Adam raconte une tranche de vie d’un ado de la banlieue de Toulouse, en 2015-2016. Fan de jeux vidéo violents, le jeune Adam se débat dans une vie à l’avenir bouché. Repéré par des radicalisés qui lui parlent d’abord de sports, de jeux et surtout le valorise. Puis seulement, après un paint-ball, ce jeu vidéo grandeur nature, arrive la religion et la possibilité d’une ‘aventure’ où la violence ne serait plus du jeu.
Avec son style rugueux privilégiant le gaufrier de six cases et le gros plan, Remedium nous revient avec un nouvel album engagé qui détonne dans les sorties entendues de la BD. L’efficacité est partout au service du récit. Une case situe l’action, – le lycée, la mosquée, la prison, …- ensuite des gros plans où l’œil ne peut que se sentir reclus dans un scénario sans issue autre que celle que nous devinons tous. Sauf Adam
Un album essentiel pour comprendre la radicalisation islamique et trouver, peut-être, un chemin pour revenir dans la vie
Adam, Remedium avec Séraphin Alava, édition La boite à Pandore, noir et blanc, 64 pages
Lison Ferné : La Déesse Requin
L’histoire est librement inspirée de La fille du roi dragon, un conte classique chinois, sorte de variation orientale de La petite sirène d’Andersen. Le monde est divisé en deux : d’un côté celui des humains, de l’autre celui des dieux de la mer dont est issue la jeune Dahut. Cette dernière ne craint pas de braver les interdits de sa mère, la déesse Boddhisatava, pour assister à une grande fête dans le monde des humains. Elle fait là une découverte qui va la bouleverser. Les humains consomment de la chair de poisson. Or Dahut, comme son peuple, créatures mi-marines mi-humaines, considère les animaux marins comme des êtres dont la vie est sacrée. Elle assiste impuissante aux tueries et au gaspillage des poissons. Dahut souhaite retourner dans son monde et retrouver les siens, mais elle se retrouve confrontée à un dilemme : le chemin du retour lui restera inaccessible si elle ne tue pas à son tour un être dont le sang s’écoulera pour lui ouvrir le passage. Refusant cet acte de barbarie, elle restera parmi les humains en choisissant d’en tirer parti pour tenter de faire disparaître leurs pratiques criminelles et protéger son peuple.
Lison Ferné, La Déesse Requin, CFC-Éditions HB, 275 x 200 mm, 112 p, F edition, 2020, ISBN: 9782875720498 (HB - F) € 18,00
Ava Dobrynine, Thomas Rome : Safari rouge “Octopus“
L’équipage du vaisseau Octopus est en route vers Mars. Ils y sont envoyés par une compagnie d’assurance pour enquêter sur un incident s’étant produit sur une base martienne, qui aurait causé la mort de plusieurs chercheurs. Mais des mois passés en huis-clos dans le vaisseau met en péril l’entente du groupe, et les intérêts divergeants de chacun menacent le bon déroulement de la mission…
Safari rouge est une fiction scientifique, agrémentant une histoire d’aventure d’un travail de prospective minutieux.
Safari rouge, volume 1 “Octopus”, éditions Weyrich, 110p, couleur Didier Schmitt, Olivier Pâques, Ava Dobrynine, Thomas Rome
Benedetta FREZZOTTI : La mie stories
La très belle couverture de Le mie stories (Mes histoires) nous donne un premier aperçu du magnifique travail de B. Frezzotti qui fait ses personnages d’abord en papier avant de venir les plaquer sur la feuille. Dès les premières pages, on apprend que Daniele veut devenir instagrammer, il va explorer cette voie mais au bout du compte c’est la photographie, activité qui l’éloigne du web et le plonge dans le monde réel, qui lui apprendra comment gérer au mieux les réseaux sociaux. Un livre au récit initiatique en italien que petits ET grands sauront apprécier ! Vivement qu’il soit traduit en français !
Benedetta Frezzotti, Le mie stories, edizione Piuma, 2019
Antoine BREDA : Un enfant comme ça
La destinée tragi-comique d’un enfant aux lunettes à cordon pas comme les autres devenu un adulte presque banal…
Charles est un petit garçon différent. Peut-être à cause de ses lunettes à cordon ? Ou alors parce qu’il ne met pas les animaux de la ferme à l’intérieur des barrières ?
Avec un père qui ne comprend pas et une mère apeurée, Charles grandit et devient malgré lui un adulte. Mais même ainsi, Charles est différent. Trop peut-être, puisque malgré tout l’amour qu’il a en lui, personne ne semble vouloir accepter ce curieux mutisme de l’âme. Cette fragilité aveugle et cette délicatesse silencieuse qui l’anime.
L’auteur nous emmène ici dans le quotidien à nu d’un être dénué de malice faisant face à la réalité dans son insidieuse cruauté. La vie telle qu’elle est sans artifice, à travers le regard simplet sans être sot de Charles.
Un portrait qui appelle à la tolérance de l’autre et qui rappelle que malgré nos différences, nous sommes tous des êtres sensibles et que tous nous avons besoin qu’une oreille attentive nous comprenne.
Un livre qui touche, qui bouscule tout en douceur et qui au final, fait du bien !
Antoine Breda, Un enfant comme ça, 80 pages - 19.0 x 26,5 cm - Couleur, EAN 9782849533444, 16,00 €
Quentin Heroguer : Maisons de célébrités
Aquarelliste de talent, Quentin Heroguer a publié quelques BD et cartoons dans 64_page et a été remarqué par Robert Nahum, l’homme orchestre de 180° éditions, qui lui a proposé d’illustrer ses beaux livres. C’est le cas de ce beau livre sur Bruxelles et ses « Maisons de célébrités »
QUiD, le supplément weekend (24-25 avril 2021) de La Librepropose un long papier sur ce livre et son dessinateur.
Bruxelles Demeures de célébrités, Hervé Gérard et Quentin Heroguer, 180° éditions, novembre 2020, 15€
255Pluie Acide
POUSSIÈRE – Une histoire presque vraie

Poussière, Pluie Acide, Éditions Même pas peur, décembre 2020, 16 €.
REMEDIUM / ALAVA
ADAM – L’ATTRACTION DU PIRE

Adam - L'attraction du pire - Remedium / Alava - La boite à Pandore - 14.90€
Sara GRÉSELLE
Bastien ours de la nuit 
Chez 64_page, on aime les beaux récits, et on aime encore plus ceux qui racontent quelque chose de notre vie, des valeurs qui doivent la soutenir et nous aider à réfléchir sur notre vivre ensemble. Et c’est d’autant plus vrai quand ces récits s’adressent aux plus petits.
Avec Bastien, ours de la nuit, Sara Gréselle aborde la précarité, la très grande pauvreté. Tous les enfants voient, regardent, s’interrogent sur ces hommes, ces femmes, ces enfants même, qui habitent dans un carton rencogné dans une encoignure, sous un porche, dans un trou dissimulé entre deux vitrines d’abondances. Sébastien est niché, recrovillé entre ses cartons et quelques haillons, la tête reposée sur toutes ses richesses contenues dans deux sacs en plastique, il dort.
Et comme tous les humains, quand il dort, Sébastien rêve et dans ses rêves il devient Bastien, un ours et cet ours parcourt la ville. La nuit ses rêves se réalisent, il trouve des trésors dans les poubelles, il fait des rencontres, il s’associe à un violoniste des rues sans doute aussi abandonné par la société des consommateurs. Ensemble ils récolent plus de pièces qu’ils n’en avaient jamais vues…
Les magnifiques dessins d’une ville (Bruxelles ?) la nuit à la fin d’un hiver givré de Sara Gréselle offrent, aux plus jeunes lecteurs, une vision poétique et, donc, quasi supportable du drame vécu par Sébastien. Sa réincarnation en ours Bastien permet aux auteurs – le récit sensible est de Ludovic Flamant – d’aborder le vécu de ceux qui vivent l’écrasante pauvreté chaque minute de leur vie.
Un album indispensable que les parents, les éducateurs doivent partager avec les jeunes lecteurs.
Bastien, ours de la nuit, Sara Gréselle et Ludovic Flamant, Versant Sud, sortie 14 janvier 2021, 14€50. Dès 4 ans. Sara Gréselle a publié Cousines dans le 64_page #18.![]()
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Élodie ADELLE
Le bonnet vert
Le premier album jeunesse d’Élodie ADELLE: « Lucie fait un bonhomme de neige mais le vent emporte son bonnet. Elle court, elle court pour le rattraper. Un peu plus loin, elle se retrouve face à un ours ».
L’aventure de Lucie est à découvrir dans Le Bonnet Vert…
Élodie nous avait habitué à son dessin réaliste, (1) elle nous offre, ici, une autre palette de talent, un dessin simplifié, spontané et dynamique. Une magnifique histoire de quête et de découverte pour les enfants à partir de 4 ans.
(1)Élodie Adelle a proposé Le grand voyage (extrait) dans le 64_page #14 et Au bout du fil dans le #11
Élodie Adelle, Le Bonnet Vert, Atramenta novembre 2020, 36 pages quadri, couverture souple, 14€. Dès 3 ans.
Kathrine Avraam
Tropiques toxiques
Kathrine Avraam a publié deux histoires courtes dans 64_page (Thomas #13 et Café divinatoire #18) qui nous avaient éblouis par son travail des couleurs et l’originalité de ses scénarios. On la retrouve comme coloriste sur un album ambitieux. Tropiques toxiques, le scandale du chloredécone fait un état des lieux catastrophique de la situation des Antilles complètement polluées par le chloredécone. Bien qu’interdit en métropole depuis 1990, Cet insecticide organochloré toxique et écotoxique est utilisé massivement contre le charançon du bananier entre 1972 et 1993 dans les Antilles françaises où il a détruit la faune, la flore et est vecteur d’une explosion de cancers mortels chez les humains.
Kathrine Avraam utilise des gammes de couleurs, vert olive, jaune ocre, brun ou des rouges, roses, mauves qui font vivre les ambiances tropicales, des bananeraies ou des villages en contrastes avec les couleurs choisies pour les pages en métropole aux couleurs plus agressives. Une BD documentaire exigeante et intelligente.
Tropismes toxiques, le scandale du chloredécone, Jessica Oublié (scénario), Nicola Gobbi (dessin), Kathrine Avraam (couleurs) et Vinciane Lebrun (photos), Les Escales Steinkis, témoins du monde, 128 pages dont un dossier documenté sur la chloredécone, 22€.
Yohan Colombié-Vivès
Vacances en famille
Lucas part en vacances de neige avec toute sa famille, son papa, sa maman, sa grande sœur, son petit frère, ses grands-parents et surtout son yéti Nono. Vacances en famille raconte la première journée de vacances et les découvertes de Lucas du départ en train à la première nuit dans le chalet. Le jeune lecteur, à partir de 3 ans, découvre, en compagnie de Lucas, les lieux de ses futures vacances, les pistes de ski, la piscine, le restaurant…
C’est un ‘cherche et trouve’, – Lucas perd systématiquement un de ses parents qui perdent tous l’un ou l’autre objet – le jeune lecteur multiplie ses plaisirs, retrouvez Lucas, puis sa famille assez fantasques, et enfin les objets égarés. Les doubles pages foisonnent de personnages et de scènes amusantes et tendre, outre le yéti Nono, on croise une famille de cochons chargées de valises, une sorcière équipée de son balai qui attend le train, des crocodiles patineurs et même un cyclope…
Yohan Colombié-Vivès a un dessin clair et séduisant, débordant de surprises graphiques, il mêle personnages humains, animaliers et imaginaires et propose un monde merveilleux, poétique où se croise toute la richesse d’une société multiculturelle. Un chouette bouquin continuellement à redécouvrir par les enfants et qui peut les occuper lors d’un long voyage vers la neige, par exemple.
Vacances en famille, Yohan Colombié-Vivès, éditions L’Agrume, 12 doubles pages, 16€ à partir de 3 ans
Aurélie Wilmet
Rorbuer
64_page a eu le bonheur de prépublier un extrait de Rorbuer dans notre n° 11 à la mi-2017. Nous avions été impressionnés par la maturité graphique d’Aurélie Wilmet et aussi, et peut-être surtout, par son sens du récit. Voici comment elle présentait son travail : « L’histoire se situe dans un village nordique où les mythes et légendes gèrent le quotidien des villageois. Des croyances où la mort physique des hommes en mer n’est pas le dernier stade de leur être […]. ». Construit sur son vécu, un voyage aux confins du nord à bord du Framet un séjour sur une île quelque part entre Kristiansand et Mandal. Aurélie nous dit y avoir appris la pêche en mer et le séchage du poisson, mais aussi les légendes nordiques.
Rorbuer est un splendide album dont l’histoire dure et mystérieuse est remarquablement peinte et suggérée par des couleurs fortes, où domine la gamme des rouges, du rose sang à l’incandescence des incendies. Aurélie nous ravit par les chaleureux paysages du village aux petites maisons pourpres jetées sur les plaines de verts primesautiers bordés du bleu-gris d’une mer forte et violente. Et soudain, nous glissons dans la rage tumultueuse de la mer et des hommes. Un album à découvrir absolument.
Rorbuer, Aurélie Wilmet, Super Loto Éditions, juin 2020, 20 €.![]()
La biodiversité
Yohan Colombié-Vivès
Yohan Colombié-Vivès a publié Une vie de chien dans le 64_page #14 et vient d’illustrer La biodiversité, un splendide album jeunesse pour les 7 à 13 ans.L’écologie est, aujourd’hui, au cœur de nos préoccupations et singulièrement de celles de nos enfants. Le sujet est vaste et ardu et, comme tous les thèmes,il peut paraître embrouillé et neutralisé quand les politiques et les médias s’en emparent. Cet album constitué de chapitres courts propose une solide découverte de la biodiversité, de son histoire depuis l’antiquité jusqu’à aujourd’hui, et s’étend des débuts des sciences du vivant jusqu’aux mouvements de défenses de la nature qui dressent un état des lieux très préoccupant. Les illustrations de Yohan sont éclatantes de couleurs, de poésie, d’humour, de scènes décalées et engagées. L’illustrateur prend la défense de la nature et des animaux, même des peu sympathiques, et les bulldozers qui détruisent la forêt et les usines polluantes ont des visages humains… Le talent de l’illustrateur contribue à rendre ce bel album accessible aux plus jeunes.
Cas d’école
Le nouvel album de REMEDIUM
Mensonges et harcèlement
Un « cas d’école », c’est, habituellement, un « cas correspondant au modèle théorique enseigné ». Quand l’auteur-illustrateur français Remedium l’utilise, en titre de son nouvel album, « Cas d’école, histoires d’enseignants ordinaires » (Equateurs, 100 pages, 15 euros), c’est en prenant son sens a contrario. Les quatorze histoires qu’il consigne dans sa bande dessinée sont terribles, révoltantes. Des histoires d’enseignants, d’enseignantes, en classe ou dans le bureau de direction, qui ne croient plus à l’école publique, qui n’ont trouvé d’autre issue que de s’effacer. Dépressions, suicides, parfois mentionnés par les médias, étouffés par l’Education nationale française.
Remedium, Christophe Tardieux de son vrai nom, sait de quoi il traite. Il est lui-même professeur des écoles. En Seine-Saint-Denis. Il a été confronté à une histoire terrible. A vécu la violence hiérarchique qui cache, enterre, ignore, blesse et met en colère. Car c’est bien la colère et la révolte contre un système qui écrase qui relie ces récits. Enseignant le jour, dessinateur le soir, Remedium publie sur Facebook ses bandes dessinées dénonciatrices. Révélation de la crise que vit la profession, travail de mémoire pour que ces morts ne soient pas vaines. Il a ajouté des histoires inédites pour l’album. Effroyables destins que ceux de Jean, Laurent, Sabrena, Manal, Chloé, Christine, Jacques, Annie, Fatima, Rachida, Jean-Pascal, Christophe et Cécile, pleins d’idéal et d’enthousiasme, broyés par la machine administrative orchestrée par le ministre Jean-Michel, l’avant-dernier des portraits.
Et pour en savoir plus le blog de Jacques Schraûwen : https://bd-chroniques.be/index.php/2020/09/23/cas-decole/
Cas d'école: L'histoire de Jean-Michel et L'histoire de Laurent (extraits)
Cas d’école, histoires d’enseignants ordinaires, Remedium, Équateurs. Septembre 2020 Site de Remedium : http://lacitedesesclaves.org/ et son blog sur médiapart : https://blogs.mediapart.fr/remedium/blog
La dramaturgie – L’art du récit
de Yves Lavandier, éditions Les Impressions nouvelles – 704 pages – 36 €
Les Impressions nouvelles réédite la « bible des scénaristes » qui nourrit les raconteurs d’histoires depuis plus de vingt ans déjà, dans une édition révisée. Des livres qui enseignent le dessin, il y en a pléthore dans les librairies et les bibliothèques. Mais pour écrire un bon scénario, il y en a trois: La dramaturgie, Construire un récit et Évaluer un scénario. Ces deux derniers titres seront prochainement réédités également aux Impressions nouvelles.
Yves Lavandier est auteur dramatique, cinéaste et script doctor. Il a été formé à Columbia University par, entre autres, Frantisek Daniel et Milos Forman. Dans La dramaturgie, il décortique les mécanismes du récit avec de très nombreux exemples, issus du cinéma, de la télévision , du théâtre et de la bande dessinée, bref de tout art qui a quelque chose à montrer: de Certains l’aiment chaud à Tartuffe en passant par Les bijoux de la Castafiore et Astérix et le chaudron, de Breaking Bad à Retour vers le futur en passant par Quartier lointain ou La mort aux trousses, les illustrations abondent dans chaque domaine, et à chaque paragraphe. Grâce à ces nombreuses références, Yves Lavandier explique de façon très éclairante les mécanismes du conflit, des obstacles, des protagonistes, de l’ironie, du flashback, du dialogue, etc. On apprend en même temps une foule d’anecdotes intéressantes!
Lecture plus que conseillée aux scénaristes de tous poils! L’ouvrage représente un coût certain (surtout si on veut lire les 3 ouvrages!), mais il y a toujours moyen d’emprunter en bibliothèque, à un ami, voire de se l’offrir à plusieurs!
Présentation de l’éditeur:
Pendant la Seconde Guerre mondiale, dans le camp de concentration de Stutthof, une femme du nom de Flora dirigeait un théâtre de pain. Avec une partie de sa maigre ration, elle modelait de petites figurines. Le soir, en cachette dans les toilettes, elle et quelques prisonnières animaient ces acteurs de mie devant des spectateurs affamés et promis au massacre. Où qu’il soit, quelle que soit l’époque, l’être humain est entouré d’histoires et a besoin d’histoires. Cela lui est aussi vital que l’oxygène.
Depuis plus de vingt ans, il existe un livre qui parle de ce besoin : La Dramaturgie d’Yves Lavandier. Un livre devenu culte dans les milieux professionnels.
La Dramaturgie se présente comme l’équivalent contemporain de La Poétique d’Aristote. C’est donc un traité sur les mécanismes du récit, leur raison d’être et leur signification. Mais alors que le philosophe n’avait que les pièces grecques pour illustrer son ouvrage, Yves Lavandier peut s’appuyer sur un répertoire beaucoup plus riche, puisant ses nombreux exemples dans le théâtre, le cinéma, la télévision, les contes et la bande dessinée.
La Dramaturgie fait aujourd’hui l’objet d’une nouvelle édition aux Impressions Nouvelles. Yves Lavandier a révisé son livre pour l’occasion. Il s’adresse en priorité aux dramaturges et aux scénaristes (débutants comme professionnels), mais il intéressera tous les partenaires des arts du récit, acteurs, producteurs, metteurs en scène, dessinateurs, et même les spectateurs curieux de mieux comprendre le théâtre, le cinéma ou la bande dessinée, et les rapports que ces arts entretiennent avec la vie.
Le nouvel album de Remedium: L’enfant qui ne voulait pas apprendre à lire
L’enfant qui ne voulait pas apprendre à lire pose la difficulté, parfois invalidante, de l’accès à la lecture pour un certain nombre d’enfants. Remedium, instituteur en primaire, en sait quelque chose. Sa forte envie de donner à ses élèves les moyens de réussir, a donné naissance à cette belle histoire où l’enfant qui ne voulait pas apprendre à lire trouvera la motivation.
La critique de Lucie Cauwe: https://lu-cieandco.blogspot.com/2019/02/apprendre-lire-oui-mais-pourquoi.html
L’enfant qui ne voulait pas apprendre à lire, © Remedium – Des ronds dans l’O. 10€,
1600 aphorismes recueillis par Olivier ROUGE et Philippe SCHOEPEN augmenté de 40 dessins originaux de Cécile BERTRAND…
Le carnet inspirales est en vente sur www.facebook.com/olivier.rouge/
Eux, c’est nous
A l’occasion de la Journée Internationale des Migrants, les Éditeurs Jeunesse avec les Réfugiés rééditent Eux, c’est nous …
Toutes les infos sur https://Lu.cieandco.blogspot.com
Claude PONTI – Le Fleuve
Lucie Cauwe
Début septembre, alors que paraissait le livre « Enfances » dont il est le coauteur, Claude Ponti indiquait être « terriblement en retard » pour son nouvel album. Apparemment, il s’est bien rattrapé, ou il a mis les bouchées doubles, ou il a engagé des poussins, ou… En tout cas, « Le fleuve » est là et bien là, réjouissant sur le fond et sur la forme. En format à l’italienne (63,5 cm d’envergure!), avec un joli dos toilé couleur de chocolat noir (l’école des loisirs, 60 pages). « Le fleuve », c’est une histoire-fleuve qui coule de source. De splendides illustrations déployant toute la palette de l’artiste…
Pour en savoir plus : https://lu-cieandco.blogspot.com/2018/11/du-fleuve-aux-enfances-avec-claude-ponti.html
Max l’explorateur – BARA
par Vincent Baudoux
L’humour de par le monde
À son apogée dans les années 1960, Max l’explorateur est publié dans plus de 40 journaux dans autant de pays, faisant de son créateur, Guy Bara, le dessinateur européen le plus lu dans le monde. Si Max l’explorateur vit ses aventures quotidiennes au coeur de la décolonisation (le Congo belge devient indépendant en 1962), il est paradoxal de voir Max, ingénu, sans complexe, sans mémoire collective, se comporter déjà comme les futurs touristes ébahis de tant d’exotisme et de couleurs locales (Il y a du Monsieur Hulot en lui). Son succès est ainsi dû au décalage entre la réalité historique et la manière toute insouciante dont il la perçoit et y réagit. Son regard fait que les contrariétés et les malheurs aussi dramatique soient-il dans le « vrai » monde, sont toujours vécus comme une gentille et naïve dérision.
Communicateur sans frontières
Max prend toutes les situations au pied de la lettre. Si la série est avare de paroles, bulles et autres onomatopées caractéristiques de la bande dessinée, sa manière de communiquer utilise plutôt le langage universel des signes gestuels, des expressions du visage, du « body langage ». Max mime davantage le langage parlé qu’il le pratique. N’est-ce pas d’ailleurs pas la façon la plus simple de se faire comprendre lorsqu’on parcourt le monde, un jour ici, le lendemain sur un autre continent, ou sur une île déserte ? La théâtralisation du langage recèle un autre avantage, en effet un récit en trois cases ne peut se permettre les longues tirades. Au plus court, le mieux. Voilà pourquoi Max, qui prend tout au premier degré, est si souvent victime des illusions. Et pourquoi la série est un chef d’oeuvre de l’humour muet.
Inventer avec les contraintes
Etant donné le format réduit des cases et la qualité médiocre des papiers journaux de l’époque, la lisibilité doit être le premier critère. Aussi, le dessin de Max l’explorateur est dicté par les impératifs de l’impression en photogravure — comme chez Hergé — avec un tracé noir sans nuance sur un fond blanc. C’est la raison pour laquelle les décors dessinés par Bara sont le plus souvent suggérés, sans réelle possibilité de localiser le lieu sinon de manière générique, une plage, une forêt, une montagne, la mer ou l’océan. Chaque signe est évoqué à partir du même régime graphique, par exemple cette petite fleur dans un coin vaut autant que la mimique expressive de Max au centre de l’image. La profondeur rebute Bara, ses idées visuelles ont tendance à dérouler la surface en une image qui en devient deux, ou trois, ou une seule grande case panoramique. On voit souvent Max examinant de bizarres traces de pas sur le sol, ces d’indices devenant autant de pistes d’une prochaine rencontre avec l’altérité. Exactement ce que fait Bara l’explorateur lorsqu’il dessine Max l’explorateur. Ce qu’ils explorent tous les deux, finalement, bien davantage que des pays, des cultures, des usages et coutumes, est un principe narratif, le système même du gag sans paroles tel que pratiqué à l’époque.
Les éditions Dupuis éditent une sélection parmi les 13.000 gags de Max l’explorateur dessinés par Bara.
Une revue réalisée par, notamment, deux des auteures publiées par 64_page, Éléonore SCARDONI et Romane ARMAND. Une belle aventure commence, à découvrir et soutenir !
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DROIT D’ASILE
Les éditions Des Ronds dans l’O poursuivre leurs engagements pour les droits humains, après Etenesh l’odyssée d’une migrante de Paolo Casaldi, elles nous proposent Droit d’Asile d’Étienne Gendrin.
Jeune dessinateur de BD, Étienne Gendrin rencontre des demandeurs d’asile et des jeunes en difficulté au Foyer du jeune homme de Strasbourg géré par l’Armée du Salut et financé par la Région d’Alsace.
Étienne Gendrin se sert de son expérience personnelle pour donné la parole à des jeunes garçons qui ont fui leur pays en guerre, pour certains, et arrivent en Europe remplis d’espoir. Ces histoires sont bouleversantes et remplies d’espoirs.
Étienne Gendrin vit en Alsace, il est scénariste, dessinateur et musicien. Dans Droit d’Asile, il dit vouloir: « nous faire saisir les peurs, les risques, les aléas de la vie de mineurs sans papiers en France« .
Droit d'Asile de Étienne Gendrin 96 pages couleurs - format 17x24, album cartonné - 18€ - Éditions des Ronds dans l'O. contact@desrondsdanslo.com Sortie le 10 octobre 2018 - Album réalisé avec Amnesty International France.![]()
Gribouzine
Christopher BOYD*, le type hyper doué qui tire-plus-vite-que-son-ombre votre portrait des deux mains, et deux de ses amis, Amélie PÉCOT et Corentin PELAPRAT se lancent dans une aventure aussi créative que délirante, ils lancent un fanzine de 108 pages de BD toutes en couleurs…
Pour réussir, Gribouzine et ses trois fondateurs ont besoin de votre soutien! Rendez-vous sur leur page: https://fr.ulule.com/gribouzine/
*Christopher est non-seulement à découvrir dans le #4 de 64_page mais sur beaucoup de festival BD où il exerce ses talent d'ambidextre en vous caricaturant...
Cow Boys et Far West
https://lu-cieandco.blogspot.com/search?q=cow+boys
La poupée de Monsieur Silence
Le premier album de Xan HAROTIN
Le monstre plat
Xan qui collabore aussi avec 64_page présente son premier album ce dimanche 3 juin au WOLF. Voici ce qu’elle nous dit de cette première expérience d’édition: « Mon objectif dans ce livre était d’illustrer l’histoire de l’auteur en y amenant ma touche personnelle. Tout en respectant son histoire, j’ai essayé d’apporter des choses nouvelles en lien avec le texte. Par rapport aux lecteurs, je savais que ce serait une première lecture à partir de 6 ans, l’idée étant que l’enfant puisse commencer à déchiffrer seul l’histoire et qu’il trouve suffisamment de plaisir dans les images pour continuer la lecture. Après libre à l’adulte de l’accompagner et si lui aussi peut s’amuser et s’y retrouver, je serai contente.
Cette expérience m’a permis de comprendre comment fonctionnait une collaboration avec une éditrice. Comme c’était ma première expérience, cela m’a beaucoup apporté, tant au niveau de la construction d’un livre que du rapport qui se fait entre les demandes et contraintes. Il faut jongler entre ce qu’on voudrait apporter de personnel et les attentes de l’éditrice. De plus, on ne se rend pas forcément compte du temps que cela peut mettre entre la signature d’un contrat et la sortie du livre. Il y a les images que l’on crée, les envois de mails constants pour montrer l’avancement du travail, les retouches, les rajouts, la deadline pour l’illustratrice n’est pas la même que pour l’éditrice, qui de son côté à d’autres paramètres à régler. L’impression, la communication et bien d’autres choses. Au final, on est chacun un maillon de la chaîne du livre. »
J’ai lu, j’ai aimé :
Riad Sattouf, L’Arabe du Futur 3, Une jeunesse au Moyen-Orient (1985-1987)
Mea culpa ! S’il y a une constante dans ma vie de lectrice c’est le délit de fuite dès que j’aperçois un best-seller… j’ai déjà commis deux fois la même infraction… mais ne m’en tenez pas rigueur, je vais essayer de me racheter en vous parlant de ce tome 3 !
« Je demeurais quelquefois une heure dans une compagnie sans qu’on m’eût regardé, et qu’on m’eût mis en occasion d’ouvrir la bouche ; mais, si quelqu’un par hasard apprenait à la compagnie que j’étais Persan, j’entendais aussitôt autour de moi un bourdonnement : » Ah ! Ah ! monsieur est Persan ? C’est une chose bien extraordinaire ! Comment peut-on être Persan ? » » Montesquieu et ses Lettres persanes m’ont accompagnée tout au long de la lecture de ce roman graphique qui nous interpelle sur un sujet encore bien ancré dans notre temps où intolérance et ignorance sévissent toujours de commun accord pour mieux marginaliser l’autre, l’étranger, celui qu’on ne connaît pas !

©Sattouf/Allary Editions 2016
Ici, c’est un blondinet de 7 ans qui nous prête son regard pour disséquer le comportement des adultes, partant de sa famille la plus proche, il examine ensuite tous ceux qui tournent autour de celle-ci. Balancé entre Occident et Orient, entre mère et père, Riad n’a de cesse de nous interroger sur ce Persan qui peut être, ici, Syrien, là, Français, et bientôt, les deux à la fois ! Il dévoile ainsi les travers des uns et des autres : les athées de culture chrétienne fêtent Noël, pourquoi les Athées de culture Musulmane, eux, ne feraient-ils pas Ramadan ?
De cette comparaison constante naît le choc… non pas des cultures… juste le choc de celui qui se découvre différent. Je ne sais plus, du coup, si ce livre revendique quoi que ce soit, ni qui, d’eux ou de nous, a le plus de travers. Il semblerait que la différence étant ce qui nous fonde, nous serions tous l’étranger de quelqu’un… voilà le sentiment qui se dégage de cette lecture que je ne saurai que trop vous conseiller pour tordre le cou à l’ignorance et à l’intolérance !
J’ai dit ! Il ne me reste plus qu’à remercier le Père Noël pour ce cadeau 😉
AVE
Colt, éperon, dada et BD
Il y a des modes. En déco c’est la tendance nordique, en vêtements c’est le retour du bombers, en sport c’est la trottinette et en BD c’est le western. Alors l’idée n’est pas de faire une liste exhaustive de tous les titres parus ces derniers temps, mais bien de souligner ceux qui sortent du lot. On n’oublie pas pour autant les ancêtres Comanche, Jerry Spring, Buddy Longway, Blueberry ou Lucky Luke, ou les plus récents et excellents Bouncer et Lincoln par exemple (mais quand sortira enfin le prochain tome de Lincoln!!??). Mais le genre ne cesse d’attirer de nouvelles plumes. A l’Ouest, tout est nouveau. Et ça tire dans tous les sens ! Dans le style classique les puritains adoreront Undertaker dont la ligne claire et élégante rappelle parfois le trait de Swolfs. C’est l’histoire d’un mec… dont le physique et le passé nous font douter qu’il est bien plus qu’un simple croque-mort : la vengeance est un plat qui se mange froid ! C’est dans la série Stern que l’on retrouve également un croque-mort qui pour le coup a la tête de l’emploi : évidemment il a lui aussi un passé bien différent surtout quand on lui découvre une passion dévorante pour la lecture des grands classiques tels Mary Shelley, Charlotte Brontë ou encore Victor Hugo. Y’a pas à dire, ça détonne dans le contexte. On n’arrêtera pas de saluer le travail de Matthieu Bonhomme sur L’homme qui tua Lucky Luke, un véritable hommage au célèbre cowboy dans la plus pure tradition. Toujours dans la tradition on pourrait citer des titres moins récents mais tout aussi réussis comme Texas Cowboys ou Ulysse Wincoop.
Et il y a ceux qui dézinguent les codes du western à coups d’humour et de dessin aux antipodes du genre. Plus à l’Est quoi. Ainsi dessina le grand Christophe Blain. Gus et ses couvertures flashys, ses grands nez, son humour superbe, son propos parfois cru et ses héros quelque peu torturés font entrer les cowboys dans un moule différent : Gus et ses complices sont des bandits mais aussi des humains à la psychologie complexe ! Un humour plus potache vous attend dans le Lucky Luke de Bouzard : Jolly Jumper ne répond plus. Dans un style ceci dit bien fidèle à Morris avec ses couleurs franches en arrière-plan, Bouzard emmène Lucky Luke et les Dalton dans un périple qui nous fait remonter le passé: les clins d’oeil à tous les grands albums de Morris s’enchaînent à un rythme impressionnant. On en oublierait presque effectivement que Jolly Jumper, au grand désarroi de son cowboy solitaire, ne répond plus !
Avec tout ça, on me dit que c’est une honte de ne pas avoir encore lu L’odeur des garçons affamés. Ben oui, vu le titre ça ne se devine pas facilement, mais il paraît que c’est un western qui décoiffe ! Alors la suite au prochain numéro, pied-tendre !
Marianne
Undertaker – Dorison, Meyer et Delabie, Dargaud. Stern – Julien et Frédéric Maffre, Dargaud. L’homme qui tua Lucky Luke – Matthieu Bonhomme, Lucky Comics. Texas Cowboy – Trondheim et Bonhomme, Dupuis. Ulysse Wincoop – Festraëts et Bachelier, Gallimard. Gus – Blain, Dargaud. Jolly Jumper ne répond plus – Bouzard, Lucky Comics. L’odeur des garçons affamés – Frederik Peeters et Loo Hui Phang, Casterman.
J’ai lu, j’ai aimé.
une rubrique ouverte à tous, animée par AVE.
Aimer lire c’est aimer voyager, se projeter dans d’autres vies, rêver, s’évader, se révolter, grandir, s’épanouir… aimer lire c’est aimer partager.
Partager les lectures que l’on a apprécié est un modus vivendi qui, depuis que j’ai eu envie d’apprendre à lire (ce qui nous ramène bien des années en arrière quand j’étais une petite enfant (NON, il n’y avait pas de mammouths à cette époque-là !) et que, analphabète encore, j’écoutais avec fascination les histoires que me racontait mon grand-père, (merci papi pour m’avoir donné l’envie de lire… il faut dire qu’il s’appelait Félix, mon papi… et je dis cela, non pas en pensant à Félix, le chat, mais juste parce que Félix veut dire « heureux » en latin), m’obsède, le geste de partage m’obsède donc… et, par exemple, quand je rencontre quelqu’un pour la première fois, je lui tends rarement d’abord ma carte de visite, en revanche, je glisse timidement dans notre conversation le titre du livre qui se trouve sur ma table de chevet ! (NON, ceci n’est pas un article sur les techniques d’approche !).
C’est comme ça depuis avant même que j’apprenne à lire (et avant même que je ne dispose de cartes de visite) ! C’est comme ça aussi que j’ai fait (et continue de faire) les plus belles rencontres de ma vie ! (Sans hésitation, j’affirme qu’un bon livre c’est mieux que Meetic !)
C’est ainsi qu’il m’est venue l’idée de cette rubrique qui se veut un espace de partage et donc de rencontre : Je lis, j’aime, je partage ! Dans cette rubrique, vos lectures sont les bienvenues, vous pouvez nous les faire parvenir à travers : notre page web (http://www.64page.com/), ou notre page Facebook (https://www.facebook.com/64page/ ) et nous les partagerons sur le site web !
Je ne vous impose rien sauf trois petits points que voici : 1, Avoir aimé la lecture que vous partagez 2. Écrire une dizaine de lignes 3. Nous autoriser à faire une révision orthographique du texte.
Au plaisir de vous rencontrer sur le site web de 64_page, votre revue de récits graphiques!
tot ziens, au revoir, tschüss, ma’as-salama, hasta la vista, agur, goodbye, lehitraot, arrivederci, sayônara,ha det,adeus, do vidjenja, kwa heri, ki ça vos våye bén, hoşça kalın, hej då, devlesa, a reveure, pewkayal… ave
Les Prix Artémisia 2017
Dans ce monde de brutes le Prix Artémisia vient récompenser un album de bande dessinée dont l’auteur est une femme. Exceptionnellement, cette année, à l’occasion des 10 ans du Prix, ce ne sont pas moins de 4 albums qui sont couronnés!! C’est dire le choix (sur 37 albums parus en 2016 sélectionnés) devant une présence de plus en plus nette et surtout qualitative de la gent féminine dans l’univers très mâle de la bande dessinée. Cinq femmes ont ainsi été mises à l’honneur ce 9 janvier, jour anniversaire de la naissance de Simone de Beauvoir.
Pour son japonisant et dansant Frapper le sol (Actes Sud – L’An 2), Cécile Wagner obtient le Grand Prix Artémisia.
Pour son drôle de livre Le Problème avec les femmes (Dargaud), la britannique Jacky Fleming reçoit le Prix Artémisia Humour.
Chloé Wollmer et Carole Maurel quant à elles sont récompensées du Prix Artémisia Avenir pour L’Apocalypse selon Magda (Delcourt).
Pour son biopic chantant et militant, Nicole Augereau reçoit le Prix spécial du jury Artémisia pour Quand viennent les bêtes sauvages (FLBLB).
Marianne
Le Loup en slip
Wilfrid Lupano et Paul Cauuet sont connus pour Les vieux Fourneaux une excellente série, comédie sociale mettant en scène Antoine, Mimile, Pierrot et Sophie quatre héros atypique dans la BD puisque ils sont du troisième âge… Celle les deux auteurs s’adressent aux enfants avec l’illustratrice Mayana Itoïz.
Dans notre société où la violence et la peur se sont, depuis quelques mois, insinuées petit à petit dans toutes les têtes, dans toutes les rues, Lupano et Cauuet ont eu l’idée géniale de transposer cette psychose collective et déraisonnée au petit monde de la forêt qu’un loup terrorise.
Les habitants de la forêt s’organisent. Ils créent une brigade anti-loup qui patrouille dans les sentiers, placent des barrières anti-loup, organisent des cours de self-défense anti-loup…Cette terreur est évidemment exploitée par certains qui y voient l’occasion de s’enrichir pour les uns, et pour d’autres, c’est l’occasion de prendre un ascendant … Toute cette petite société s’organise autour cette peur irrationnelle et de sa lutte pour l’enrayer. L’absurde cercle vicié… Jusqu’au jour où le loup dont les fesses sont très sensibles au froid, sort affublé d’un splendide slip à lignes rouges. La vie de ce coin de forêt bascule, le loup ne serait donc pas un monstre !
Un album magnifique par le traitement d’un sujet d’actualité difficile et dramatique qu’il dédramatise avec humour et intelligence. Les magnifiques dessins colorés, fouillés parsemés de détails cocasses permet d’ouvrir une discussions avec les enfants.
Le Loup en slip. Wilfrid Lupano (scénariste), Paul Cauuet (auteur) et Mayana Itoïz (dessinatrice) – Dargaud, 2016
Mathilde Brosset, autrice, illustratrice et aussi animatrice d’ateliers.
Á découvrir.
Meunier, tu dors ?
Il était une fois… Dans un pays lointain…
Les mêmes formules ou presque, dans le monde entier, et voilà que s’ouvre l’espace de l’imagination et de la parole universelle. Lire, écouter, dire des contes, c’est se replonger dans une époque de l’enfance, et aussi se relier à la partie la plus intérieure de nous-mêmes.
Les contes nous parlent, de nous, de nos peurs. Ils évoquent les mémoires des anciens mythes et nous relient à notre inconscient collectif. Ils nous racontent l’origine des choses, la naissance du monde et le pourquoi on vit. Mathilde participe par ces contes enchantés à faire renaître le conte dans le monde littéraire.
L’inspiration pour son premier livre pour enfants, Meunier, tu dors ? (Atelier du poisson soluble), vient d’une promenade à Bruges où tout au long du chemin elle admire les petits moulins et se rappelle la comptine qui traverse nos mémoires. Elle décide d’en tirer une histoire et elle crée un album. Le meunier est vite ennuyé par le nombre invraisemblable de personnes qui viennent visiter le moulin. Celui-ci tourne alors de plus en plus vite pour chasser les importuns. Le personnage du meunier, c’est un peu elle ou chacun de nous quand on a besoin de calme. Nous avons dans les mains un joli album tout en carton pour petits. Ses personnages sont mis en scène sur un fond de couleur verte.
Elle articule et joue les petits bouts de papier comme un petit théâtre animé. Sa palette de couleurs est joyeuse (beaucoup de verts) et elle reprend à nouveau les carrelets (petites cabanes de pêcheurs) de son enfance. Si on observe bien, on retrouve une répétition de certains motifs comme les animaux (par exemple le chien qui se promène souvent dans ses dessins), les objets, les rayures, les frises.
A lire dans un prochain 64-page.
« On n’est pas là
pour faire des dessins d’innocence »
Plus de vingt ans qu’il scrute l’actualité avec son crayon acéré et une patte bien à lui. Des milliers de dessins, autant de personnages pour des centaines de faits majeurs mais pas seulement. Nicolas Vadot, c’est d’abord un trait très particulier, une caricature léchée qui a fait sa signature.
Pour la première fois, il nous livre un album généraliste, sorte d’almanach de son monde à lui en 2015 et 2016. « C’est évidemment mon regard, mais je suis inévitablement tributaire de l’actualité , explique celui qui a choisi de devenir son propre éditeur. Ce n’est pas courant mais j’aime maîtriser complètement mon bouquin, du choix des dessins, à la mise en page en passant par l’impression et la diffusion. Je prends le pari que c’est une approche qui va se développer à l’avenir. »
Les élections américaines ne se sont pas fait prier pour s’inviter dans les pages de ce bel opus sur la couverture duquel Barack Obama trône en maître du monde. « Sur le dessin initial, il n’y avait que lui. Mais je craignais que les lecteurs pensent que c’était un ouvrage qui lui était consacré. Or, ce n’est pas le cas, il n’y a que deux dessins du futur ex-président des Etats-Unis dans tout l’album. »
Regard journalistique
Hillary et surtout Trump, eux, sont bien plus présents. « J’aime beaucoup les Etats-Unis et je regrette l’antiaméricanisme primaire qui est trop souvent de bon ton dans les médias. Mais j’avoue, en même temps, que c’est un pays qui peut parfois être effrayant. Je pense à Bowie et son I’m afraid of Americans. C’est un pays fantastique qui peut nous servir des personnages pour le moins pitoyables. Cette campagne présidentielle est épouvantable. Donald Trump contre Hillary Clinton, c’est comme si vous aviez en France un duel politique entre Cyril Hanouna et Ségolène Royal. C’est une femme politique compétente qui doit affronter un fou furieux. »
Quand Nicolas Vadot prend la plume, ce n’est jamais gratuitement. Chaque trait – pourtant délié – est rigoureusement juste. Au fil des ans, sa patte s’est affirmée et son propos s’est fait plus chirurgical. Il passe au scalpel toutes les crises mondiales. « Si on se reporte quelques années en arrière, on constate que l’Europe a perdu sa place centrale. Elle a du mal à l’accepter, on peut même dire qu’elle commence seulement à le comprendre. »
La crise des réfugiés est un autre sujet qui s’est imposé. Mais l’auteur l’a traitée avec une vraie retenue. « A l’origine, j’avais mis trois dessins sur cette thématique omniprésente ces derniers mois. Mais quand on a vu le résultat en page, on avait l’impression qu’il s’agissait presque d’un running gag. Avec mon graphiste, qui est un vrai ami de longue date, on a donc opté pour une seule image agrandie. Elle dit tout. Le message est bien plus fort. Dans ce genre d’ouvrage, la sélection est terrible. Il n’y a pas un dessin sur cinq qui résiste. Je veux que les dessins qui se retrouvent dans cet ouvrage soient pertinents et signifiants. La caricature ce n’est pas seulement du dessin, c’est un travail de journaliste. Les attentats qui nous ont touchés ont été terribles et c’est étonnant comme, lorsque l’on vit des événements comme ceux-là, on se retrouve inondé par des dessins de tous types sur tous les réseaux sociaux. La caricature, pour moi, ce n’est pas ça. On n’est pas là pour faire des dessins d’innocence mais des analyses. Le dessin n’est pas une fin, c’est un moyen. »
Une analyse synthétique qui, la plupart du temps, fait mouche. Nicolas Vadot, comme la plupart des grands caricaturistes qui nous amusent et nous font réfléchir au quotidien, a le don d’aller à l’essentiel en quelques traits mais avec, chez lui, un petit supplément d’âme qui fait sa particularité.
---> Nicolas Vadot : Barack tu nous manqueras, dessins 2015-2016. Ed. Nicolas Vadot - Sandawe. 130 pp.
Quatrième album pour la trop rare Judith Vanistendael
Salto
l’histoire d’un marchand de bonbons qui disparaît sous la pluie!
La jeune dessinatrice néerlandophone bruxelloise nous avait habitués à des récits intimistes, autobiographiques (*), où se déclinaient des émotions fortes autour d’un noyau restreint de personnages embarqués dans un bouleversement de leurs vies.
Avec Salto elle aborde un nouveau registre. D’abord en partageant le travail avec un scénariste, l’espagnol Mark Bellido, ensuite elle se lance dans le triller politique. Salto reste, toutefois toujours, une histoire vécue, celle de Mark Bellido qui a été garde du corps d’un homme politique basque à l’époque où ceux-ci étaient des cibles pour les indépendantistes de l’ETA.
Judith et Mark se sont rencontrés sur la route de Santiago de Compostela. Il écrivait un roman autobiographique, elle lui a proposé de l’adapté en BD. Près de trois années plus tard, Judith Vanistendael nous offre un gros album, plus de 360 pages, réalisé aux crayons de couleurs et, pour être complet, quelques pages en risographie.
Outre l’histoire de Miguel/Mikel, marchand de bonbons, qui pour nourrir sa famille s’engage comme garde du corps et fini par perdre cette famille, les auteurs nous entraînent dans la routine désabusée des gorilles et la nonchalance sardonique de ceux qu’ils doivent protéger d’ennemis invisibles. Les personnages sont croqués d’un trait simple, lourd de sens, comme écrasés de l’intérieur par leurs destins, leurs vies insignifiantes perdues à sauver celles inconscientes et insolentes de martyrs en puissance. Pour contre-balancer ces destinées en dés-errance, Judith nous offre de magnifiques paysages d’une Espagne écrasée sous le soleil ou noyée sous la pluie…
Pour en savoir plus sur Judith Vanistendael – article dans 64_page #2 (janvier 2015), sur notre site www.64page.com/#2/judithvanistendael et une vidéo interview sur la chaîne You tube de 64page: https://www.youtube.com/watch?v=UJ6ZPxmonHY&feature=em-upload_owner
Salto, l’histoire d’un marchand de bonbons qui disparaît sous la pluie, Judith Vanistendael – Mark Bellido, Le Lombard, 2016 (*) David, les femmes, la mort, Judith Vanistendael, Le Lombard, 2013 (*) La jeune fille et le nègre (2 volumes) Judith Vanistendael, Acte Sud – L’an 2, 2008/2009
Les culottées de Pénélope Bagieu

©Gallimard/Pénélope Bagieu
Pénélope, qui a honoré notre 6e numéro d’une interview, sort en édition papier ses courtes bandes dessinées publiées sur le blog du Monde. Elle les consacre à des femmes qui se sont illustrées au fil des siècles dans différents arts: le sport, la science, le spectacle, la politique, ou tout simplement par une force de caractère qui les distinguait dans un pays et/ou une époque qui ne leur était pas favorable. Un joli tour du monde et de l’Histoire sous le signe de la femme.
Ce livre regroupe quinze courtes et amusantes biographies donc, mais d’autres sont visibles sur http://lesculottees.blog.lemonde.fr/ De belles découvertes!
Marianne
PS: Un 2e tome aussi réjouissant est paru en janvier 2017!!
Une réédition aussi magnifique qu’indispensable :
Félix de Maurice Tillieux

© Maurice Tillieux – Allume-Gaz, Félix et Cabarez devant la Citroën Traction II que Maurice Tillieux ‘offrira’ à Félix dès 1951 – Héroïc-album n°39, Programme non stop précédant la parution N’y touchez pas, il est Maudit – 1951
Pour ceux qui apprécient la BD belge, Maurice Tillieux fait partie des plus grands, des incontournables. Mais aussi des presque oubliés. Heureusement, une petite maison d’éditions de Waterloo, les éditions de L’Élan, viennent de se lancer dans une réédition intégrale des aventures de Félix.
Félix était publié par Héroïc-Album, un hebdo créé par Maurice Cheneval en 1944 et qui présentera une réelle alternative à Spirou (1938) et, ensuite, au Journal de Tintin (1946). Héroïc, contrairement à ses concurrents ne s’autocensure pas. Félix, contrairement à Tintin ou Lucky Luke peut se servir d’un révolver, ce qui convient très bien à Maurice Tillieux qui adorait déjà les univers glauques, les gangsters patibulaires aussi méchants que bêtes et les ambiances lugubres…

© Maurice Tillieux – L’étrange Monsieur Queen – Héroïc-albums n° 16 – 1952
Héroïc-Album vivra jusque en 1956. Tillieux passera ensuite chez Spirou et créera sa série la plus connue, Gil Jourdan. Série calquée sur Félix puisque les trois protagonistes Gil Jourdan, Libellule et Crouton sont la filiation directe du trio Félix, Allume-Gaz et Cabarez.

© Maurice Tillieux – Les yeux dans le dos, Héroïc-Albums n°28 – 1954
Réédition en 11 albums, format A4 cartonné, d’une qualité d’impression exceptionnelle.
Chaque album contient, et contiendra, six histoires complètes de 12 pages — reproduites comme à l’origine, la première page est en quadrichromie et les suivantes en noir et blanc — un dossier, bien illustré de documents souvent rares, présentant un des aspects du travail de Tillieux et les fameux Programmes non-stop qui assuraient la présence de Félix et maintenait le désir des lecteurs pendant que Tillieux dessinait l’aventure suivante.

Une collection exceptionnelle… Qui vous demandera 66 mois de patience pour l’obtenir entièrement! Tout vient à point à qui sait attendre…
Les albums sortent de 6 en 6 mois, — on en est au second, le troisième devrait paraître en décembre 2016 — en commençant par le volume 5, puis le 6, le 7 ensuite, dans l’ordre, 1, 2, 3, 4, 8, 9, 10 et 11. Cette curiosité s’explique par le souhait de l’éditeur de présenter, en premier lieu, des épisodes jamais réédité jusqu’ici.
Album vendu 29€ dans les bonnes librairies BD belges ou chez l’éditeur www.editionselan.be
Sourire 58
Un album pour fêter les 60 ans de l’Expo Universelle et de l’Atomium…
Les aventures de Kathleen Van Overstraeten et Jean-Marc Spruyt imaginées par trois bruxellois, un écrivain, Patrick Weber, un dessinateur, Baudouin Deville et jeune éditeur, Nicolas Anspach. Ils réunissent leurs talents pour réaliser un album BD qui commémore l’édifice le plus connu de Bruxelles, l’Atomium.
Un scénario intriguant et glamour
Pendant la construction de l’Atomium. L’équipe d’électriciens se prépare à prendre son service. Ils sont chargés d’installer les lampes dans les sphères. Ils portent des masques de protection. Un des hommes est appelé au téléphone Il court dans le bureau du chantier. Il répond… « Allo? » Personne ne répond. L’ouvrier n’est pas content. Est-ce une mauvaise plaisanterie ? Il se retourne, il se trouve face à un homme en combinaison noire (l’album puise ses références dans les grands classiques de l’époque : James Bond, Hitchcock, Diabolik…), La silhouette noire le poignarde. L’électricien est enfermé dans une des toilettes. Il troque sa tenue contre celle de l’ouvrier et il prend sa place. Le soir, le corps de l’électricien est coulé dans un bloc de béton d’un pavillon en construction.
Amours torrides sur fond de guerre froide…
Dans le même temps, Kathleen se prépare à sa fonction d’hôtesse pour l’Expo 1958. écoutons-la: « Pendant notre préactivité, qui dura quatre mois, nous avons étudié les projets de l’Expo grâce à des conférences données par des journalistes, des professeurs d’université ou encore les architectes des jardins ; un véritable retour aux études…». Des visites de musées et d’usines agrémentèrent cette remise à niveau de leur culture générale. Et n’oublions pas les conseils de maquillage et de généreusement prodigués par des jeunes femmes d’instituts de beauté ».
Lors de sa première mission (une visite chantier avec une vedette de l’époque, Cordy… qui casse la baraque avec son 45 tours Hula Hoop), Kathleen se fait voler son sac par un gamin. Un homme assiste à la scène, il court après le gamin qui jette le sac à terre. Il le ramène à Kathleen (en fait, nous verrons plus tard qu’il s’agit d’une mise en scène… il a payé le gamin pour qu’il joue ce tour pen-dable et bien se faire voir de la jeune femme). Ce beau jeune homme au physique de Cary Grant s’appelle Jean-Marc Spruyt et il travaille au pavillon du gouvernement belge, face à l’Atomium….
Un bouquin qui s’annonce passionnant et que vous pouvez soutenir et participer à sa réalisation en vous rendant sur le lien: http://www.sandawe.com/fr/projets-auto-finances/sourire-58/blog
Vous y découvrirez d’autres aspects de cette intrigue…
Un beau projet à défendre !
De Bric & de Broc un album de François-Joseph Bubblenoise
François-Joseph BUBBLENOISE a participé en 2015 à l’illustration du dossier Vampires (64_page #3, juin 2015). Humours et critiques, parfois acerbes, contribuent aux charmes d’un dessin dynamique, simple et efficace
Parution officielle le 15 octobre 2016.
Une offre exceptionnelle pour les pré-commandes jusqu’au 30 septembre 2016 : 10€ (frais de port compris pour la Belgique et la France)
Vous recevrez votre exemplaire dédicacé AVANT le 15 octobre.
Les 30 premiers exemplaires commandés seront augmentés d’un ex-libris exclusif, numéroté et collé à l’intérieur du livre…
Paiement via Paypal : leseditionsmademoisellezoe@gmail.com ou par virement bancaire.
Pour plus d’infos, merci de me contacter sur ma page Facebook : www.facebook.com/francoisjoseph.bubblenoise